La Bataille de Fontenoy
La bataille de Fontenoy1
J’ons vu le poème fringant
Fait par ce monsieur Voltaire2
;
Quoiqu’il ait de l’esprit tant
Est-ce que je devons nous taire ?
Pour briller tout comme lui,
Je n’avons qu’à chanter Louis.
Aux plaines de Fontenoi
Si t’avais vu ce monarque,
Son air inspirant l’effroi
Semblait commander à la Parque.
Ses ennemis criaient tous :
Le voilà, morbleu ! sauvons-nous.
On voyait aussi partout
Le mari de la Dauphine3
;
De son père il a le goût,
La bonté, le cœur, la mine ;
C’est grand bien d’être papa
Quand on a des enfants comm’ça.
Et toi, brave maréchal,
Toi, de Saxe le grand comte4
,
Si l’on trouvait ton égal,
Je dirais : bon ! queu chien dc comte,
Car je n’y vois que le Roi
Qui puisse l’emporter sur toi.
Vous aussi, braves guerriers,
Colonels et capitaines,
Et vous autres officiers,
Cueillant lauriers par centaines,
Je dirai ce qui vous convient,
Mais un moment : v’la que ça vient.
Lcs Anglais à leurs dépens
Connaissent votrc courage,
A tous vos coups foudroyants
En vain ils opposaient leur rage.
Ils expiraient glorieux
D’être terrassés par les Dieux.
Sous les yeux du grand Bourbon,
Tous les Français se surpassent :
Dans les jambes de Biron
Trois ou quatre chevaux trépassent,
Chaque Anglais qui l’approchait
Sous son bras aussi trépassait.
Et toi, Richelieu, vraiment,
Tu fis bien le diable à quatre ;
Je crois que si Cumberland
Contre toi seul voulait combattre,
Tu l’aurais plus tôt vaincu
Que tu n’aurais fait un cocu.
- 1 - Fontenoy est un petit village de Belgique voisin de l’Escaut et à deux lieues au sud est de Tournay, où les Français, commandés par le maréchal de Saxe et Louis XV, triomphèrent des Anglo-Hollandais sous les ordres du duc de Cumberland. (R)
- 2Voltaire, alors historiographe de France, venait de faire imprimer un petit poème sur la bataille de Fontenoy. (R)
- 3M. le Dauphin s’est trouvé aussi à cette bataille. (M.) (R)
- 4Il a été fait duc à brevet depuis cette bataille. (M.) (R)
Raunié, VII,57-59 - Clairambault, F.Fr.12713, p.125-26 -Maurepas, F.Fr.12648, p.119-21 (sauf les deux derniers couplets) - F.Fr.10477, f°260 - Arsenal 3133, p.645-47 - Mazarine Castries 3989, p.152-54 (moins les deux derniers couplets)