

Nouvelles de la cour1
Pendant qu’on inonde Paris
De couplets et de sots écrits,
Monsieur Albert2 reste à rien faire.
Lèrela, lère lanlère,
Lèrela, lère lanlà.
Louvois nous fait le méchant tour
De fêter nos dames de cour ;
Prenons un vol plus téméraire.
Chacun se demande tout bas :
Le Roi peut-il ? ne peut-il pas ?
La triste Reine en désespère.
L’un dit qu’il ne peut ériger,
L’autre qu’il ne peut s’y nicher,
Qu’il est flûte traversière.
Ce n’est pas là que le mal gît,
Dit gravement maman Mouchi ;
Mais il n’en vient que de l’eau claire.
Lassone3, à qui le prince écrit
Sur le mal qui glace…
Hier m’en conta le mystère.
Le grand ménage couronné
Est du mot puce enfariné ;
Mais chacun l’est à sa manière :
La Reine a le puce inhérent,
Le Roi le prépuce adhérent,
C’est le pré qui gâte l’affaire.
Donc, pour avoir postérité,
Il faut à cet amour botté
Grandir la porte de Cythère.
Antoinette, qui sait cela,
Pour grandir cette porte-là
Fatigue plus d’une ouvrière.
Que de talents sont employés !
Mais ce n’est pas encor assez ;
La surintendante4 a beau faire.
Les ris, les jeux, les petits doigts
Y signalent de vains exploits ;
Mais N. N. en font leur affaire.
Ces noms-là, je veux les cacher,
Car je ne dois pas empêcher
Qu’une reine devienne mère.
Pour apprécier mon sentiment
J’ai la lettre de sa maman
Qui lui mandait encor naguère :
« Ma fille, ayez un successeur ;
Peu m’importe que le faiseur
Soit devant le trône ou derrière ;
Mais, avant de faire un cocu,
Tâchez de l’avoir convaincu
Qu’il a le pouvoir d’être père.
Le travail où je vous induis
Est le chef-d’œuvre de vos nuits ;
Pour les détails, c’est votre affaire ;
Si tout cela n’arrive pas,
Certaines gens je vois là-bas,
Qui vous tailleront des croupières. »
Comme il fut dit, il sera fait ;
Et si la ruse a son effet,
Que maint beau prince ils nous vont faire !
Bientôt, pour notre amusement,
Nous en lirons le doux roman
Malgré Sartine et son compère.
L’un est ministre sans honneur,
L’autre un honnête empoisonneur
Dont on eût dû purger la terre.
C’est le cas de dire ou jamais :
A sot maître, fripons valets ;
A froid époux, chaude commère.
Petite Reine de vingt ans,
Qui traitez aussi mal les gens,
Vous repasserez en Bavière.
En attendant ces doux instants,
Le doux fruit de vos passe-temps,
Vous aurez ma chanson, j’espère :
Lèrela, lère lanlère,
Lèrela, lère lanla.
Numéro $1414
Année 1776
Sur l'air de ... Lèrela, lère lanlère
Description
24 x 3 + refrain
Références
Raunié, IX,77-82 - F.Fr.13652, p.330-34 - BHVP, MS 699, f°133-34
Mots Clefs Vers obscènes sur la stérilité du couple royal