Ah !… c’est Jeannot
Ah ! c’est Jeannot
Nargue de la scène tragique,
Et foin de nos meilleurs auteurs !
Car l’on préfère au bon comique
Le boulevard et les farceurs.
Ah ! Français frivoles,
A qui l’on attache un grelot,
Que vous êtes drôles !
Qui fait mouvoir votre grelot ?
Ah !… c’est Jeannot.
Tel on voit le peuple idolâtre
Oublier la sainte Sion,
Vous abandonnez le théâtre
De l’esprit et de la raison.
Quelle est donc l’idole
Du peuple frivole ?
Ah !… c’est Jeannot.
Le bon goût va faire merveille ;
Molière n’est plus de saison ;
Et l’on voit bâiller à Corneille1
Tous les gens qui sont du bon ton.
Chefs-d’œuvre superbes !
Ce sont des proverbes
Dont l’auteur ne serait qu’un sot,
Sans… son Jeannot.
Désertons la scène française,
Vive Lécluse et Parizot2
!
Et ne traitons point de fadaise
Les grands Boulangers de Chaillot3
.
Ce n’est plus les drames
Qui plaisent aux dames ;
Pour les amuser il ne faut
Qu’un… bon Jeannot.
- 1« Dans le même temps où l’on voyait une si grande affluence de monde à la cent-douzième représentation de Les Battus paient l’amende, il n’y avait pas deux loges de louées pour la première représentation de Rome sauvée de.M. de Voltaire, et à la troisième, la salle était déserte. O Athéniens ! Athéniens ! » (CLG)
- 2Dlrecteurs des Variétés amusantes. (M.) (R)
- 3Pièce du répertoire brillant de ce spectacle. (M.) (R)
Raunié, IX,218-21 - CSPL, IX, 87-88