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Sur la retraite des chartreux à Utrecht

Sur la retraite des chartreux à Utrecht

                         Ode

Vois-je des mortels ou des anges ?

Dieu seul écoute leurs soupirs.

Unique objet de leurs louanges,

Il remplit leurs chastes désirs.

La mort dont les tristes présages

Font pâlir les plus grands courages

Les frappe et ne les étonne pas.

Leur langue est vouée au silence.

Vertu, fille de l’innocence,

Seule vous marchez sur leurs pas.

 

Ils comptent les nuits par leurs veilles.

Tandis que tout cède au sommeil

Divin amour tu les réveilles,

Tu leur tiens lieu de soleil.

A la seule voix de l’Église

Leur âme est fidèle et soumise.

Rien ne peut ébranler leur foi.

Heureux Bruno, qui de Dieu même

Partage la gloire suprême,

Tes enfants sont dignes de toi.

 

Mais que vois-je ? hélas, est-ce un songe ?

Ils ont quitté tes étendards.

Nouveaux partisans du mensonge,

Je les vois fuir de toutes parts.

L’erreur est l’étoile fatale

Dont cette impudente cabale

Suit les dangereuses clartés ;

Au gré de cet astre perfide

Qui les égare et qui les guide,

[…] Ils sont emportés.

 

C’en est fait, ces faux catholiques

Ont brisé le joug paternel.

Triomphez, secte hérétique,

Goûtez un plaisir criminel.

Leurs exploits sont dignes des vôtres.

Disciples des mêmes apôtres

Partagez un triomphe vain

Et si l’on peut goûter des charmes

Dans l’éternel séjour des larmes,

Vos lauriers charmeront Calvin.

 

Mais quelle noire destinée

Arrête leurs pas dans Utrecht ?

Vont-ils à l’erreur couronnée

Offrir un coupable respect ?

Tout y reconnaît son domaine,

Et cette rare souveraine

Reçois un encens odieux,

Et la foi, ce céleste gage,

Couverte d’épais nuages,

N’ose paraître dans ces lieux.

 

L’Église est assez outragée :

Dépouillez un zèle apostat ;

Sachez qu’elle sera vengée

Puisque pour elle un Dieu combat.

En vain d’une fausse victoire

Vous espérez de recueillir la gloire,

Vous n’êtes pas victorieux.

Ou cessez une aveugle guerre,

Ou craignez qu’enfin le tonnerre

En vous frappant n’ouvre vos yeux.

 

Voos prières répudiées

Frappent l’air de sons superflus ;

L’erreur les a falsifiées ;

Le Ciel ne les écoute plus.

Infracteurs de ses lois suprêmes,

Vos soupirs ne sont que blasphèmes.

Et vous prétendez le fléchir !

Votre espérance est téméraire

La mort sera votre salaire

Rien ne peut vous en affranchir.

 

Tels qu’une riante prairie

Qui cache un serpent sous ses fleurs,

Vos écrits avec industrie

Cherchent à séduire nos cœurs,

Mais leur adresse captieuse

D’une conduite vicieuse

Masque en vain le dérèglement.

Vos plaintes sont un vrai délire,

Et si quelquefois je supire

C’est de voir votre aveuglement.

 

Ne fondez pas votre espérance

Sur les vains applaudissements

De ces prélats dont l’éloquence

Célèbre vos égarements.

Hélas ! un dangereux suffrage

Ne sert qu’à hâter le naufrage

De ceux que l’erreur a séduits,

Et souvent par un faux indice

Au fond du même précipice

Pasteurs et troupeaux sont conduits.

 

De vos illusions honteuses

N’êtes-vous pas désabusés ?

Présentez des mains courageuses

Aux fers que vous avez brisés ;

Osez revoir ces saints articles

Où vos cœurs autrefois dociles

Goûtaient d’une céleste ardeur ;

Vos larmes seront éloquentes,

Et vos prières triomphantes

Désarmeront un Dieu vengeur.

 

L’erreur doit fuir et disparaître.

Tous n’ont pas écouté sa voix,

On voit encore ici renaître

Et des Brunos et des Benoîts.

Ingrats, votre exemple perfide

N’a pu de leur âme intrépide

Ebranler la stabilité.

Aidés par des secours suprêmes

Soumis à Dieux, maître d’eux-mêmes

Ils seront ce qu’ils ont été.

 

Numéro
$7088





Références

BHVP, MS 602, f°55v-57r


Notes

Discours passablement incohérent. On ne sait même pas si la décision des chartreux est louée ou stigmatisée.