Sur la convalescence de M. le Dauphin
Sur la convalescence de M. le Dauphin
par M. de Bonneval
Le Te Deum des Philosophes
Est aujourd’hui libre et naturel.
Il pénètre au travers l’étoffe
De ce monde matériel.
Il ne reçoit point de fanfares,
Et ces frivoles ornements
Du peuple expressions bizarres ;
Il met tout en sentiment ;
Au trône du Souverain être
Par l’esprit il est transporté.
Sans trop tenter de le connaître
Il rend hommage à sa bonté.
C’est là que dans son sanctuaire,
Inaccessible à tout mortel,
Dieu seul découvre le mystère
De l’encens pur et criminel.
Il déteste la politique
L’intérêt et la vanité,
Source fréquente et chimérique
Du Te Deum le mieux chanté.
Ce Dieu distingue l’origine
Et tout le faste extérieur,
Et d’une essence divine
Il n’admet jamais que le cœur.
Philosophe est son image,
Puisqu’il est la pure raison,
Et de sa discrète oraison
Il ne dédaigne pas l’hommage.
Le philosophe est toujours prêt,
Il est soumis avec courage,
Et dans le plus fort de l’orage
Il baisse la tête et se tait.
Ainsi dans ces jours de tristesse
Où la France tremblait pour toi,
Jamais un instant de faiblesse
Ne vint intimider sa foi.
Il conjura la providence
De consoler notre Titus.
Sur le nombre de tes vertus
Il fondit ta convalescence.
Il sent la grandeur du bienfait,
Il prie dans le silence,
Il rend grâce dans le secret.
F.Fr.10479, f°185r-186r