Sur l’assemblée des prélats au sujet de la Constitution
Sur l’assemblée des prélats au sujet de la Constitution
Or écoutez, petits et grands,
L’avis de Monseigneur du Mans1
Qu’il a dit en pleine assemblée
Nommant la Bulle empoisonnée,
Ce qui fit rire les prélats,
Tous ceux qui n’en font pas grand cas.
Faut savoir que depuis cinq mois
Les jésuites sont aux abois
Pour faire venir dans la France
De Louis une grande ordonnance
Contre le Nouveau Testament,
Signé au bas Pape Clément.
Mais comme il faut selon les lois,
Dit-on, que les évêques françois
Signent aussi toutes ces bulles
Sans quoi nous les tenons pour nulles,
Divers prélats ils ont pêchés
Assemblés à l’archevêché.
Le cardinal est président2
Soubise est cardinal ponant
Qui dans son rapport au concile
Contre Quesnel vomit sa bile
Disant, nous faut tous sans façon
Signer la Constitution.
Un si beau discours fut suivi
De tous les prélats du parti.
Ils sont en tout trente et quarante
Dont quelques-uns sont dans l’attente
Du Saint-Esprit, du Cordon bleu
Ou d’un chapeau couleur de feu.
Mais neufs prélats de grand renom
Formèrent opposition
Disant qu’il y a dans la Bulle
Des défauts qui la rendent nulle
Et qui blessent l’honneur de Dieu,
Qu’ils déduiront en temps et lieu.
Or l’avis de Monsieur du Mans
Fut de joindre un bon mandement
Qui serait comme une pilule
Contre le poison de la Bulle,
Pour servir de contrepoison
À tous ceux qui la recevront.
On dressa donc un mandement
Lequel fut lu publiquement
Mais on jugea cet émétique
Insuffisant dans la pratique
Pour remédier à ce venin
Venu du pays italien.
Faut-il pas être sans raison,
Messieurs, pour donner du poison
À nos brebis, à nos ouailles,
Dit le cardinal de Noailles ;
Il faut laisser aux charlatans
D’éprouver leur orviétan.
Or prions le Rédempteur,
Qu’il conserve son serviteur
Contre la Bulle empoisonnée,
Car c’est ainsi qu’elle est nommée
Par Mr. l’évêque du Mans,
Parrain de la bulle à Clément.
Maurepas, F.Fr.12645, p.134-36 et 193-95 - F.Fr.15159, f°22r-24r