Fastes de Louis Quinze
Fastes de Louis Quinze
Sous le gouvernement
Du cardinal de Fleury
Élevé par les soins du sage Villeroy,
Aux ballets en public j’ai dansé malgré moi.
Sous le docte Fleury, fléau du jansénisme,
J’ai sucé, jeune encore, le lait du calvinisme.
Sous sa tutelle enfin, en pupille soumis
Le timon de l’État à vingt ans je remis.
J’en ai trente à présent, et lui nonagénaire
Radote et déshonore en tout le ministère.
En vérité je sens et ne sens que trop bien
Que vous périrez tous si par sa destinée
Il allait vivre encore le cours de cette année,
Et qu’en laissant toujours mon royaume affamé
Je resterais le roi d’un peuple inanimé
Mais j’ai le cœur trop bon et quoiqu’il en arrive,
Pour nos communs malheurs, si le Ciel veut qu’il vive,
À ses cruels décrets il fait nous résigner.
J’aurai toujours assez le loisir de régner.
Attendez donc le jour où la parque propice
Me fera roi profès au lieu de roi novice.
Alors, débarrassé d’un mentor odieux,
Faisant tout à mon gré, voyant tout par mes yeux,
Je pourrai sans contrainte étaler ma débauche
Et vous montrer, Français, de quel bois je me chauffe.
NAF.9184, p.63