Sans titre
Sur Gresset
Monsieur Gresset, un rosaire à la main,
Criait : Pardon, je rougis de ma vie.
J'ai fait pour vous certaine comédie,
Où l'ordonnance a fait rire Arouet.
Ah ! si le ciel pardonne ce forfait,
Jusqu'à la mort j'en ferai pénitence,
Le tombeau seul assure l'innocence.
Voyez le pauvre Diable1
De vers, de prose et de honte étouffé
Je rencontrai Gresset dans un café
Gresset doté du double privilège
D’être au collège un bel-esprit mondain
Et dans le monde un homme de collège,
Gresset dévot, longtemps petit badin,
Sanctifié par ses palinodies.
Il prétendait avec componction
Qu’il avait fait jadis des comédies
Dont à la Vierge il demandait pardon2 .
Gresset se trompe, il n’est pas si coupable.
Un vers heureux et d’un ton agréable
Ne suffit pas ; il faut une action,
De l’intérêt, du comique, une fable,
Des mœurs du temps un portrait véritable
Pour consommer cet œuvre du démon.
Stromates, I, 538
Extrait du Balai, poème de Dulaurens. Les huit premiers vers appartiennent à la première édition. La suite est empruntée à la seconde (1763)