Monarque souverain
Par cas de conscience
Je viens vous avertir
Qu'on va perdre la France.

Le plus fameux coquin
Qu'on ait vu sur la terre
Nous mène tous bon train
A la civile guerre.

Il traite comme un chien
Un sénat respectable
Qui ne veut que le bien
De l'État misérable.

Pour mettre à ces maux fin
Prenez un habile homme,
Au lieu de ce vaurien
Et l'envoyez à Rome.

Mais le plus court chemin
Et le plus désirable
Ce serait dès demain
De l'envoyer au Diable.

Ne souffrez pas enfin
Qu'un peuple se mutine
Ôtez les quatre sols
Ils sont notre ruine.

Faites pendre avec soin
Et sans miséricorde
Les chiens de maltôtiers.
J'en payerai la corde.

Ils ont les plus beaux bancs,
Les plus beaux équipages
Et chez les pauvres gens
Mettent tout au pillage.

Passe par tant de mains,
L'argent qui vient des nôtres.
Il n'est presque plus rien
Quand il arrive aux vôtres.

A Fleury n'allez pas
De tout ceci rien dire.
Le drôle ne veut point
Qu'on vienne vous instruire.

Le petit Chauvelin
Malgré sa tête altière
De Pomponne a reçu
Très fort les étrivières.

Le cardinal blondin
Ranime sa parure
Tandis que Chauvelin
Gouverne et qu'on murmure.

A tous le Roi bénin
Réplique turelure.
Le peuple crie en vain
Qu'il n'est roi qu'en peinture.

On en est si certain
Qu'on lui fait mainte injure.
Mais contre tout dédain
La chasse le rassure.

Pourvu qu'il tue un daim
Il se rit qu'on censure.
Il est donc bien malin ?
C'est la malice pure.

Non, non, il n'est pas fin,
La pauvre créature.
Il ignore s'il fait bien
Ou si la raison jure.

Hélas, il ne sait rien
Ou c'est par aventure.
On le dit bon chrétien
Car le nonce en assure.

On le dit bon chrétien
Car le nonce en assure ;
Ce nonce ne vaut rien,
Il mérite brûlure.

Nous n'avons encore vu
Rien qui soit légitime.
Aujourd'hui la vertu
Du vice est la victime.

Nos braves conseillers
S'en vont en décadence
Dans le pays lointain
Faire leur résidence.