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Les Pairs de France

Les pairs de France
Le petit duc de Saint-Simon
Voudrait bien payer de son nom,
Pour les services de ses pères.
On ne saurait dire qu'hélas !
Aussi bien on n'en connaît guère,
Pour mieux dire, on n'en connaît pas.

La Force, commis d'Argenson,
Hait beaucoup le bruit du canon ;
Il craint qu'un boulet ne le perce.
Pour oisif, il ne l'est jamais ;
En guerre il fait la controverse,
Et la maltôte en temps de paix.

Vivent messieurs nos ducs et pairs !
Ils sont certainement sans pairs,
Ils savent très bien les finances ;
Ils sont habiles en tous sens,
Et si versés dans les sciences,
Que Mercure eut moins de talents.

Comme ce Dieu, ils sont sorciers,
En toutes sortes de métiers,
Excepté celui de la guerre.
Et si par malheur aujourd'hui,
Il sortait des géants de terre,
Ils s'iraient cacher comme lui.

La Trémoille1 , Uzès2 , Uzès, Richelieu,
Tous pairs comme il plaît à Dieu ;
Ajoutons Mazarin, d'Estrées3 ,
Fortes colonnes de l'État,
S'ils n'avaient pas la diarrhée
Quand il faut aller au combat.

Mettons encore en même sac,
Aumont4 , Rohan5 , Sully6 , Brissac7 .
D'autres qui n'ont vertu ni vice,
Mais bons à parler de leur rangs8 ,
A tenir un lit de justice,
A morguer les princes du sang9 .

  • 1Charles‑Louis Bretagne, seigneur de La Trémoille, duc de Thouars, premier gentilhomme de la chambre du roi. (R)
  • 2 - Jean‑Charles de Crussol, duc d’Uzès, devenu pair de France en 1706, après la mort de son frère aîné, Louis de Crussol. (R)
  • 3Louis‑Armand d’Estrées, de Lauzière‑Thémine, duc d’Estrées. (R)
  • 4Louis d’Aumont de Rochebaron, duc d’Aumont, maréchal de camp, gouverneur de la ville et château de Boulogne et pays boulonnais, chevalier des ordres du roi. (R)
  • 5Hercule Mériadec de Rohan, duc de Rohan‑Rohan, prince de Soubise, lieutenant général des armées du roi. (R)
  • 6Maximilien Henry de Béthune, duc de Sully et pair de France après la mort de son frère aîné (1713). (R)
  • 7Jean‑Paul‑Timoléon de Cossé, duc de Brissac, qui devint maréchal de France. (R)
  • 8 L’irritation du Régent contre le Parlement permit aux pairs de triompher des présidents dans l’affaire du Bonnet. Par un édit lu au lit de justice ils furent rétablis dans la préséance sur les présidents à mortier, et sur le droit d’opiner avant eux. (R)
  • 9Le duc du Maine subit au lit de justice une nouvelle humiliation. « On termina cette mémorable séance, dit Voltaire, en dégradant le duc du Maine, soupçonné d’être trop uni avec le Parlement. On lui ôta la surintendance de l’éducation du roi, qui fut donnée sur‑le-champ au duc de Bourbon‑Condé, et on le priva des honneurs de prince du sang, que l’on conserva au comte de Toulouse. » (R)

Numéro
$0309


Année
1718




Références

Raunié, III,75-77 - Clairambault, F.Fr. 2697, p.15-16 - Maurepas, F.Fr.12629, p.231-32