Aller au contenu principal

Rouillé et Fourqueux

Rouillé et Fourqueux
Régent, en chassant le docteur1 ,
Chasse aussi son beau-frère2 ;
L’un ivrogne, l’autre voleur ;
Tous les deux font la paire.
Le peuple a béni, ce dit-on,
La faridondaine, la faridondon,
Noailles, qui les a choisis, biribi,
A la façon de Barbari, mon ami.

Qui diable t’a donné Rouillé,
Violon de taverne ?
C’est donc par ce cerveau brouillé
Que l’État se gouverne?
Avec Scapin et Pantalon3 ,
Il décide du sort d’autrui.

Son beau-frère ne vaut pas mieux,
Il soutient sa naissance ;
Car nous avons vu ses aïeux
Clystérisant en France,
Et pour l’honneur de sa maison,
Il médicamente Paris.

C’est aux dépens de tout l’État
Que s’accroît sa famille,
Vous l’avez vu gueux comme un rat
Et voyez comme il brille ;
Il a diamants à foison,
La Pléneuf4 en touche le prix.

Fi les de Moreau, Charpentier5 ,
Filles de Villeneuve,
Des coups de ce ministre altier
Vos pères font l’épreuve.
Que n’épousiez-vous son garçon,
La faridondaine, la faridondon,
Noble, joli, gentil, poli, biribi,
A la façon de Barbari, mon ami.

  • 1Depuis que Rouillé avait pris l’habit d’un docteur de la Comédie italienne, on l’appelait, par dérision, le docteur. (R)
  • 2Fourqueux, qui avait profité de ses fonctions à la Chambre de justice pour réaliser des profits illicites. « Le sieur Bourvalais intenta procès contre M. de Fourqueux, ci‑devant procureur général de la Chambre ardente, pour ravoir certains meubles à lui appartenant qu’il soutenait n’avoir été ni vendus, ni compris dans l’arrêt de vente. Cette affaire fut portée au Conseil de régence. Ce magistrat ne fut pas le seul qui profitait du malheur des traitants ; la plupart des juges cherchèrent à s’accommoder de ce que les financiers avaient de trop. » (Mémoires de la Régence.) (R)
  • 3 Personnages bouffons de la Comédie italienne. (R)
  • 4Femme de Pléneuf, commis du bureau de la guerre, qui, pour échapper aux recherches de la Chambre de justice, s’était enfui à Turin. (R)
  • 5Parmi les personnages poursuivis par la Chambre de justice, il y eut trois Moreau : l’un était trésorier général des Invalides, et les deux autres traitants. Charpentier était boucher et entrepreneur de la fourniture des viandes pour l’armée de Flandre ; « on lui supprima trois millions qu’il prétendait lui être dus pour cette fourniture, on le croyait riche de huit ou neuf. » (Journal de Buvat.) (R)

Numéro
$0188


Année
1717




Références

Raunié, II,206-08 - Clairambault, F.Fr.12696, p.263-64 - F.Fr.15018, 241-42