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Les Revenants

Les Revenants1 dont notre histoire
Nous conservera la mémoire
Dans tous les temps,
Aux compagnons de sa victoire
Disait qu’il ne fallait pas croire
Aux revenants.

Il s’en souvient, ils s’en souviennent ;
Mais, quand des revenants reviennent
Après quatre ans,
Cette apparition notoire
Force d’en revenir à croire
Aux revenants.

Grand Roi, ta divine puissance,
Évoque les ombres en France ;
Spectres errants,
Apparaissez, bravez l’envie ;
Louis rend l’honneur et la vie
Aux revenants.

Les dieux sont dieux par leur clémence
Et c’est à regret qu’on encense
Les dieux tonnants.
Deviens Dieu par ta bienfaisance :
Tu l’es déjà par la présence
Des revenants.

Sur ces ombres patriotiques,
Et de leurs couronnes civiques
Tout rayonnants,
Plane le Romain Malesherbes
L’un des plus grands, des moins superbes
Des revenants.

Toi, Miromesnil2 , ombre fière,
Et du trône et de sa barrière
L’un des tenants,
Avec quel doux transport, chère ombre,
Nous t’avons vu d’abord au nombre
Des revenants.

Toi, revenant qui fus des nôtres,
Toi, qui fais revenir les nôtres
Et le bon temps,
Ministre sans titre et sans gage,
Maurepas3 , reçois les hommages
Des revenants.

Au comble, aujourd’hui, de la gloire,
Puisses-tu lire notre histoire
Dans deux cents ans.
Tu t’y verras, sur ma parole,
Jouer le plus auguste rôle
Des revenants.

  • 1« Les Français chantent leurs douleurs, comme leurs plaisirs ; ainsi on peut penser que nos poètes de société n’ont pas manqué de s’évertuer au sujet de la destruction et de la réintégration des Parlements. La première catastrophe a produit des vers et des pamphlets en prose dont tout le mérite était d’être méchants et de dire beaucoup d’injures vraies ou fausses. La dernière qui a rendu le gros de la nation ivre de joie, a enflammé tous nos versificateurs, mais ils n’ont enfanté rien de bien saillant. Ces couplets de M. Collé, secrétaire de M. le duc d’Orléans, sur le retour du Parlement sont les meilleurs que la circonstance actuelle ait produits. » (CLS./fn].
    Un esprit fortLe chancelier Maupeou. (M.) (R) - Un monstre affreux
  • 2« On espère beaucoup des lumières et de la sagesse de M. de Miromesnil, le nouveau garde des Sceaux ; il s’était fort distingué par sa fermeté et son intégrité à la tête du Parlement de Normandie. » (Correspondance de Métra.) (R)
  • 3« Le comte de Maurepas, ministre d’État, quoique occulte et sans titre, comme sans gage, paraissait avoir l’entière confiance du jeune monarque et influer généralement dans toutes affaires du gouvernement. » (Journal de Hardy.) (R)

Numéro
$1390


Année
1775

Auteur
Collé



Références

Raunié, IX,39-41 - F.Fr.15141, p.378-81 - BHVP, MS 705, p.192-95 - Suard, CL, p.775-78 - CLS, 1775, p.6-7 - Hardy, III, 701 - CLS, 1775, p.6-7 - Correspondance secrète, t.I, p.149-50