sans titre
Le loto, quoi que l’on en dise1 ,
Sera fort longtemps en crédit :
C'est l’excuse de la bêtise,
Et le repos des gens d’esprit.
Ce jeu vraiment philosophique
Met tout le monde de niveau.
L’amour-propre si despotique
Dépose son sceptre au loto.
Esprit, bon goût, grâce et saillie
Seront nuls tant qu’on y jouera.
Luxembourg, quelle modestie !
Quoi ! vous jouez à ce jeu-là !
- 1C’est qu’il faut être poète pour écrire en vers, et qu’il n’est pas nécessaire de l’être pour traduire un poète en prose. Il n’est pas nécessaire de l’être non plus pour faire avec quelque agrément ce qu’on appelle des vers de société, des bouquets, des couplets de fête. En voici de ce genre que le comte de Ségur, jeune seigneur fort aimable et fort instruit, a faits pour la maréchale de Luxembourg, en lui donnant pour étrennes un loto, jeu qu’elle aime beaucoup (La Harpe).
La Harpe, CL, t.III, p.304-05