sans titre
Le Chancelier1
On sait qu’il me doit tout, et que pour sa grandeur,
J’ai foulé sous les pieds remords, crainte, pudeur ;
Qu’avec un cœur d’airain exerçant sa puissance
J’ai fait taire les lois et gémir l’innocence ;
Que pour lui, des Français bravant l’aversion,
J’ai chéri, recherché la malédiction.
Et pour prix de ma vie à leur haine opposée
Le barbare aujourd’hui m’expose à leur risée.
Le Brun
Seigneur, nous sommes seuls. Que sert de se flatter ?
Ce zèle que pour lui vous fîtes éclater,
Ce soin d’immoler tout à son pouvoir suprême,
Entre nous, avaient-ils d’autre objet que vous-même ?
Et sans chercher plus loin, ces fameux exilés,
N’est-ce pas à vous seul que vous les immolez ?
Enfin la cour nous hait, le peuple nous déteste, etc.
- 1 On a parodié assez heureusement un endroit de la première scène du 3ème acte d’Esther : au lieu d’Aman et de Zarès, on suppose que le chancelier dit à son confident Le Brun en parlant du roi :(Suard).
Suard, CL, p.735-36