Parodie – Mithridate, acte III, scène I
Law
Approchez, nations, enfin l’heure est venue
Qu’il faut que mon secret éclate à votre vue.
A mes vastes projets je vois tout conspirer.
Il ne me reste plus qu’à vous le déclarer.
J’ai fui pour éviter la fortune ennemie
Et vous savez assez l’histoire de ma vie.
Mais je prévoyais bien, soigneux à me cacher,
Qu’au fond de l’Ibérie on me viendrait chercher.
La fortune a ses dons ainsi que ses disgrâces.
Déjà plus d’une fois retournant sur mes traces
Elle se fixe enfin, je ne suis point trompé ;
Je vois des actions l’univers occupé,
Présentant aux Français de puissants avantages.
Ils s’arrachent des mains mes nouvelles images.
Bientôt je veux encore par de nouveaux apprêts
Confondre les Colberts et tous les Demarets,
Et faire voir, moi seul, à l’Europe étonnée
Sous un sage régent l’ouvrage d’une année.
A la mort de Louis tout l’État accablé
Sentait à chaque jour son malheur redoubler.
Mais du Mississipi les mines découvertes
Vont réparer dans peu nos anciennes pertes.
Déjà les étrangers sont du gain altérés ;
Le bruit des actions les a tous attirés
Ils y courent en foule et, jaloux l’un de l’autre,
Désertent leur pays pour inonder le nôtre.
Moi seul je conduis. Tout à mes ordres soumis,
Chacun s’empresse ici à être de mes amis ;
Chacun pour me sauver viendrait offrir sa tête
Et le salut de Law est une ample conquête.
Seul espoir de la France, à me venir chercher
S’il est quelqu’incrédule on le verra marcher ;
Mon dessein les surprend, ils ont pensé peut-être
Qu’on le verra tomber comme on l’aura vu naître.
J’excuse leurs erreurs et pour être approuvés
De semblables projets veulent être achevés.
Ne vous figurez pas que de cette contrée
Ma nouvelle à jamais doive être séparée.
Je sais tous les chemins par où je dois passer
Et si la mort bientôt ne vient me traverser,
Sans reculer plus loin l’effet de ma parole
Dans un an j’ai tout l’or de l’un et l’autre pôle.