Vers à M. le chancelier Maupeou sur le renversement de la magistrature
Je veux bien croire à ces prodiges1
Que la fable vient nous conter2 ,
A ces héros, à leurs prestiges
Qu’on ne cesse de nous vanter ;
Je veux bien croire à ce fier Diomède
Qui ravit le Palladium,
Aux généreux travaux de l’amant d’Andromède,
A tous les fous qui bloquaient Illium.
De tels contes pourtant ne sont crus de personne.
Mais que Maupeou tout seul, du dédale des lois
Ait su tirer la couronne,
Que seul il la reporte au palais de nos Rois,
Voilà ce que j’ai vu, voilà ce qui m’étonne.
J’avoue avec l’antiquité
Que ses héros sont admirables ;
Mais par malheur ce ne sont que des fables
Et c’est ici la vérité.
Parodie
Je veux bien croire à ces grands crimes
Que la fable vient nous conter,
A ces meurtres, à leurs victimes
Qu’on ne cesse de nous citer.
Je veux bien croire aux fureurs de Médée ;
A ses meurtres, à ses poisons,
Aux funestes banquets de Thieste et d’Atrée,
A la barbare faim des cruels Lestrigons.
De tels contes pourtant ne sont crus de personne.
Mais que Maupeou tout seul, ait renversé les lois,
Et qu’usurpant la couronne
Il règne seul au palais de nos Rois ;
Voilà ce que j’ai vu, voilà ce qui m’étonne.
J’avoue avec l’antiquité
Que ces crimes sont détestables,
Aussi ne sont-ce que des fables,
Et c’est ici la vérité.
- 120 février. On attribue à M. de Voltaire les vers suivants en l'honneur de M. le chancelier ; en tous cas ils roulent sur une pensée de lui répétée en plusieurs endroits et devenue triviale. Les voici (M.). - Voici les vers que l'enthousiasme, je dirai mieux, le désir qu'a toujours eu M. de Voltaire de se mettre bien avec tous les hommes en place, lui a arrachés. J'y joins la parodie [$2316] qui en a été faite à l'instant (CLS, 1775)
- 2Voici les vers que le désir qu’a toujours M. de Voltaire de se mettre bien avec les hommes en place, lui a arrachés. J’y joins la parodie qui en a été faite à l’instant (Correspondance secrète)
F.Fr.13652, p.80 - Mémoires secrets, IV, 79 - Hardy, II, 492 - CLS, 1775, p.13 - Correspondance secrète, t.I, p.176-77
La Correspondance secrète est seule à proposer la parodie.