Noëls pour la cour de Madame la Duchesse du M.***[Maine]
Noëls pour la cour de Madame la Duchesse du M.***
A Sceaux, c’est un usage,
Aux fêtes de Noël,
Chacun va rendre hommage
A l’enfant immortel.
Car toujours au plaisir, là le devoir s’allie,
Et dans ce saint temps-là la la
La Princesse interrompt don don
Tout bal ou comédie.
G*** savait la veille
Un fort beau compliment
Qu’il eût dit à merveille
Et rendu noblement.
Il aurait enchanté l’enfant, Joseph, Marie.
Mais quand il arriva la la
Il resta court, dit-on, don don
Comme à la Comédie.
L*** suit et s’avance
D’un air noble et charmant,
Mais dès qu’elle commence
Son joli compliment,
Zilia que toujours avec elle elle porte,
S’échappe de ses bras la la
Veut mordre le poupon don don :
On les mit à la porte.
En homme de finance,
D*** venu de loin
Prit pour grossir sa panse
Une botte de foin.
Chacun lui rit au nez, dès le moment qu’il entre,
Et l’on dit que l’ânon don don
Pendant qu’il harangua la la
Lui brouta tout son ventre.
Sûr de tous les suffrages
S*** arriva
Pour offrir ses hommages,
Mais on les dédaigna.
L’habit du Glorieux, couvert de broderie,
Qu’il portait ce jour-là la la
Insultait aux haillons don don
De Joseph et Marie.
D’un ton si pathétique
Du M*** harangua
Qu’il eut la voix publique,
Et chacun l’approuva.
Sur le piteux état de Joseph et Marie
Si bien il déclama la la
Que de compassion don don
On eut l’âme attendrie.
L’ingénieuse S***
Pour le sacré berceau
Fit une pastorale
Dans un goût tout nouveau.
Les bergers y parlaient suivant leur caractère :
Nul auteur de renom don don
Jamais n’en composa la la
De si digne de plaire.
En habit de bergère
Y parut C***
Dont tout l’art est de plaire
Par ses simples attraits.
Mais la timidité, quoique vive et charmante,
Fit que l’on la trouva la la
Dans cette occasion don don
Un peu trop indolente.
L*** dans la pièce
Un pareil rôle fit
Avec tant de justesse,
D’art, de goût et d’esprit,
Que malgré son accent l’aimable Polonaise
Egala, surpassa la la
Par son geste et son ton don don
Toute actrice française.
Le nouveau Tiresie
Si clairvoyant sans yeux,
Par une parodie
Qu’il fit du Glorieux
Prouva bien que du corps lorsqu’il perdit l’esprit,
Dieu l’en récompensa la la
Par un esprit fécond don don
De plus longue étendue.
Par des marionnettes
Dans un goût excellent
Qu’un grand prince avait faites
On amusa l’enfant.
D*** qui si bien sait faire le compère
Fit rire le poupon don don,
Joseph en éclata la la
L’âne se mit à braire.
Les princes, ces deux frères,
Qu’on a vus de tout temps
Aux vertus militaires
Joindre tous les talents
Formèrent entr’eux un concert magnifique :
L’un du ballon joua la la,
L’autre du violon don don
D’excellente musique.
A cette symphonie
V*** unit sa voix
Qui fit une harmonie
Digne du Roi des Rois.
Du céleste poupon il chanta les louanges,
Et si bien les chanta la la
Qu’on confondit ses sons don don
Avec la voix des anges.
Sage dispensatrice
Du rôle des acteurs
Qui, toujours sans caprice,
Emploie les meilleurs,
M*** approuva ces innocents spectacles.
On sait le goût qu’elle a la la
Et ses sentiments sont don don
Plus sûrs que des oracles.
Entrez dans la carrière,
Divine M.***.
Déjà vous savez plaire
Et c’est l’essentiel.
Aimez à votre tour, voilà tout l’artifice,
Un peu de passion don don
Dans l’instant vous rendra la la
Une excellente actrice.
BHVP, MS 557 - Abbé de Latttaignant, Pièces dérobées à un ami, Amsterdam, 1750, 2 vol., t.I, p.193-98