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Sans titre

Il est mort le duc de Grammont1 .

Vivant, c’était un vrai plastron

De toute sorte d’affront.

Il n’est regretté dans Paris

Des grands, des moyens, des petits,

Mais très fort des ennemis.

Car aussitôt qu’il prévoyait

Que contre eux aux mains on viendrait,

Mal de ventre lui prenait.

Et monté comme un Amadis

Dès les premiers coups de fusil

A toute jambe à Paris.

Quand la foire trop le pressait

Point pour cela ne descendait,

Dans ses chausses tout lâchait.

De culotte trois fois changea

Lorsque Philipsbourg il quitta

Sans descendre de dada.

Enfin donc ce foireux Pierrot

Depuis mardi ne dit plus mot

Et dans sa bière est enclos.

 

L’épée en croix sur son tombeau

N’a jamais quitté son fourreau

Pour blesser l’humaine peau.

Aux Capucines ce héros,

Ce fier colonel des Pierrots

Ne craindra plus pour ses os.

Car comme de guerre on parlait,

Dans les troupes on augmentait,

Ce bruit son mal aggravait.

La peur en augmenta si fort

Qu’enfin le pauvre homme en est mort

Sans qu’on ait pleuré son sort.

Son frère aura le régiment.

Vaut-il mieux que lui ? Non vraiment.

Il est encor plus méchant.

  • 1Sur la mort du duc de Grammont arrivée le mardi 16 mai 1741 (Castries)

Numéro
$6177


Année
1741




Références

Mazarine Castries 3987, p.341-43