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chanson sur M. de Bernage à l’occasion de l’arrosement des boulevards

Les boulevards1
Chacun devrait te rendre hommage,
Joseph Outrequin,
Au prévôt des marchands Bernage,
A chaque échevin,
Car vous méritez bien, je pense,
Des compliments de toute part ;
Vit-on plus utile dépense
Que d’humecter notre rempart ?

Ce séjour est méconnaissable.
On est enchanté,
En voyant jeter du sable
Sur chaque côté.
D’y passer on va se résoudre,
C’est une belle chose à voir ;
La crotte y succède à la poudre,
Par le moyen d’un arrosoir.

Le marquis, le robin, le page,
Y vont tous les jours
A cheval, ou dans l’équipage,
Comme l’on fait au Cours ;
La femme la plus minaudière
Pourra s’étaler dans son char ;
Car pour abattre la poussière
On fait inonder le rempart.

Les gens de conduite mauvaise
Étaient offensés,
De ce qu’on était mal à l’aise
Dans tous les fossés.
Filles, qui cherchez là des dupes
Et qui les tirez à l’écart,
Vous ne salirez plus vos jupes,
On met des bancs sur le rempart.

Pour s’attirer la bienveillance2
De tous les laquais,
Près l’Opéra, quelle prudence !
On a fait exprès
Un palais qui n’est pas de paille
Et qui couvre un fort bel hangar3 ,
Et pour asseoir cette canaille,
On met des bancs sur le rempart.

Ma foi, c’est une mine à peindre
Que ce magistrat.
Qui voudrait à présent s’en plaindre
Serait un ingrat ;
L’accuser comme le vulgaire
D’être ignorant, lambin, musard,
C’est n’avoir pas vu la poussière
Dont il a purgé le rempart.

On voit briller en toute chose
Ce fameux prévôt,
Et si quelquefois on le glose,
C’est mal à propos.
Pouvait-il mieux dans chaque fête
Divertir le tiers et le quart ;
Aussi nous fallait-il sa tête,
Pour nettoyer notre rempart.

  • 1Autres titres : A l'occasion de bancs que M. de Bernage, prévôt des marchands, a fait mettre sur les boulevards de Paris et de l'arrosement qu'il y fait faire pour empêcher la poussière. (Arsenal 2964) - Chanson sur M. de Bernage, faite à l’occasion de l’agrandissement des boulevards et des bancs qu’on y a mis par ses ordres. (M.) — « Comme M. le prévôt des marchands a fait assez bien accommoder les boulevards, que les contre allées sont sablées, avec des bancs de pierre, et que l’allée du milieu est arrosée tous les jours pour préserver de la poussière les maisons voisines, ces boulevards font cet été la promenade de Paris qui est à la mode. Il y a, principalement les fêtes et les dimanches, un concours étonnant de carrosses qui font cours en plusieurs files depuis la porte Saint Antoine jusqu’à celle du Pont-aux Choux. Il y a aussi dans cet espace plusieurs cabarets et des loges de marionnettes. Cela fait spectacle et presque foire » (Journal de Barbier.) (R)
  • 2Pour mieux mériter le suffrage / De tous les laquais, / Près l’Opéra Monsieur Bernage / A fait faire exprès / Un palais…
  • 3Nouveau bâtiment fait pour mettre à couvert les laquais. (M.) (R)

Numéro
$1121


Année
1753




Références

Raunié, VII,223-26 - F.Fr.10478, f°622r-623r et 637r-638r - F.Fr.15155, p.57-61 - Arsenal 2964, f°73r-74r - BHVP, MS 661, f°131r-133r - Mazarine Castries 398, p.403-04 - Lille BM, MS 66, p.475-79