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Compliment à Mesdames de France

Compliment à Mesdames de France1
Mesdemoiselles de France,
J’osons vous faire la cour ;
Vous présenter en cadence
Nos respects et notre amour.
Ah ! que vous êtes gentilles,
Que vous avez l’air courtois,
L’on voit que vous êtes filles
Du meilleur de tous les rois.

Si je disons qu’on vous aime,
N’en prenez point de souci,
J’osons le dire à Dieu même
Comme à votre père aussi.
De nos cœurs le pur hommage
Leur agrée à tous les deux ;
J’espérons cet avantage
De vous tout ainsi que d’eux.

Le monde dit qu’à Plombière
Vous allez boire des eaux.
C’est une pauvre ouvrière
Que l’eau pour guérir les maux.
Tenez, le moindre ordinaire
Du vin de notre canton,
Est cent fois plus salutaire
Que les eaux de grand renom.

Je comptions vous faire offrande
De nos plus fameux flacons,
Mais le bel air nous commande
De vous donner des bonbons :
Douze boîtes à chacune,
C’est faire au mieux nos honneurs ;
Au moins gardez-en quelqu’une
Pour vos deux petites sœurs2 .

Puisque c’est aussi l’usage,
J’offrons le passepartout,
Les clefs de notre village
Tout ouvert de bout en bout.
Pour vous je les ons fait braves
En rubans et falbalas,
Ce sont les clefs de nos caves,
Loin ne les emportez pas.

Car le soir en nos familles
Je voulons boire à Louis,
Sa femme, sa bru, sa fille,
Son fils et ses petits-fils.
Que de tout mal Dieu préserve
Tous ces très honnêtes gens,
Que longs jours il leur conserve
Pour nous rendre heureux longtemps.

Mesdemoiselles de France,
Pardon, si j’en ons tant dit :
C’est qu’on a bonne éloquence
Lorsque le cœur y fournit ;
Vous aurez dans le voyage
De plus subtils compliments,
Le nôtre aura l’avantage
Des vrais et purs sentiments.

Fait à La Ferté-sous-Jouarre
Par monsieur notre pasteur,
Homme d’un mérite rare,
Car il sait lire par cœur ;
En quoi surtout il excelle
C’est en amour pour son Roi ;
Je le prenons pour modèle,
Son exemple est notre loi.

  • 1 - Chanson faite au mois de juillet 1761, au passage de Mesdames Adélaïde et Victoire de France à la Ferté sous-Jouarre, allant aux eaux de Plombières. (M.) — « Mardi 3o juin, Madame Adélaïde et Madame Victoire, filles de France, sont parties pour aller prendre les eaux de Plombières, et voir en même temps à Nancy le roi Stanislas, leur aïeul ; on dit que ce sera un voyage de trois mois. » (Journal de Barbier.) (R)
  • 2Mesdames Sophie et Louise, les deux plus jeunes des filles de Louis XV. (R)

Numéro
$1192


Année
1761




Références

Raunié, VII, 328-31