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Parodie de Phaéton. Sur Madame de Mailly

Sur Madame de Mailly1
Parodie de Phaéton.

Madame de Mailly
Ah, cher Louison, est-il possible
Que vous soyez sensible
Pour un joli minois ?
Ah, cher Louison, est-il possible
Que vous m’ayez trompé deux fois ?
Vous me causez des maux dont je frémis d’effroi.
Pourquoi me renvoyer pour cette fille gentille ?
Nous pourrions vivre heureux sous cette même loi
Qui, voilant nos secrets du temps de Vintimille,
En sœur j’eusse partagé mon Roi.
Ah, cher Louison, est-il possible
Que vous m’ayez trompée deux fois ?

Le Roi
Pour régir l’univers le ciel m’avait fait naître
Fleury qui s’est rendu mon maître
Permit que je fusse votre amant.
Il toléra mon changement.
Je ne suis pas, Mailly, ce que je devrais être.

Madame de Mailly
La jeune Destournelles a pour vous des appas ;
Vous les essayerez et votre cœur m’oublie.

Le Roi
Le règne de Tencin avec elle me lie,
Et Richelieu conduit mes pas.

Madame de Mailly
Verrez-vous cette jeune mortelle ?
Au mépris de mes pleurs votre cœur infidèle
Abandonnerait-il la mère et les enfants ?
Ma jeune sœur vous parût-elle
Cent fois encore plus belle,
Vous vous reprocherez dans les plus doux moments
Une trahison si cruelle.

Le Roi
A mon cruel cœur j’ai regret d’obéir ;
Je suis fâché de votre peine.

Madame de Mailly
Mais à Choisy sans moi on va se divertir ;
Votre pitié m’est vaine.

Le Roi
J’ai trop mérité votre haine.

Madame de Mailly
Je ne sais pas haïr.

Le Roi
Peu digne du jour qui m’éclaire,
Digne objet de votre colère,
Je ne mérite pas les pleurs que vous versez.

Madame de Mailly
Quoi donc, c’est sans retour que vous me trahissez !
Témoin de ma constance
Et de ton changement,
Iris, voyez la cruelle offense
Que me fait ce parjure amant.
Mes sœurs, servez ma vengeance ;
Qu’il périsse dans vos bras, armez-les, justes dieux,
Que ses feux soient punis, qu’ils allument la foudre ;
Que ce superbe incestueux
Tombe avec sa grandeur et soit réduit en poudre.
Que dis-je, malheureuse ? Hélas !
(Ce perfide me jure encore
Payer pour moi) il ne faut pas
Justes dieux, que je vous implore.
Je dois arrêter le fracas
De mon indigence et mes dettes,
Ingrat, qui triomphez de mon juste courroux,
Pour les payer, souffrirez-vous
Que mes amis fassent des quêtes ?

  • 1Parodie de la première scène du troisième acte de l'opéra de Phaéton au sujet du changement du Roi en faveur de Mme de la Tournelle en 1742 (M.).

Numéro
$3645


Année
1742




Références

Clairambault, F.Fr.12710, p.159-61 -Maurepas, F.Fr.12646, p.139-41 -  F.Fr.12675, p.466-69 - F.Fr.13656, p.453-55 - F.Fr.15134, p. 642-58 - F.Fr.15140, p.89-92 - F.Fr.15150, p.330-35 - NAF.9184, p.511-13 - Arsenal 3117, f°23r-24r - Arsenal 3128, f°327v-328v - Arsenal 3133, p.494-96 - BHVP, MS 558, p.53-54 - Mazerine Castries 3988, p.168-72 - Mazarine 2356, f°76r-77r