L’amour n’est plus colin-maillard1
J’ignorais les feux que j’inspire2 ,
Je n’étais rien.
Tout va changer dans mon empire,
L’esprit me vient.
On ouvre les yeux tôt ou tard,
L’amour n’est plus Colin-Maillard3 .

Je quitte mes vieilles allures
En voyant clair.
Je vais courir les aventures,
Je suis en l’air.

On ouvre les yeux tôt ou tard,
L’amour n’est plus Colin-Maillard.

Couché près de la jeune Aminthe4 ,
Je m’endormis.
Je fus réveillé par sa plainte
Et je lui dis :
Psyché5 ne devait ma constance
Qu'à mon bandeau ;
Vous devrez ma persévérance
A mon flambeau6 .

Je veux suivre de mes ancêtres
Le vrai chemin ;
A mes sujets donner des fêtes,
Bals et festins.

On ouvre les yeux tôt ou tard,
L’amour n’est plus Colin-Maillard.

Je vais gouverner par moi-même
Tous mes États ;
On verra mon ardeur extrême
Dans les combats.

On ouvre les yeux tôt ou tard,
L’amour n’est plus Colin-Maillard.

Je veux qu’on obtienne les grâces
Par mon canal ;
Je vais me revêtir des places
Du cardinal.

On ouvre les yeux tôt ou tard,
L’amour n’est plus Colin-Maillard.

Je veux qu’on rende à l’Éminence
Ce qu’on lui doit.
Ayant usé de ma confiance
De bonne foi ;
Mais il faut régner tôt ou tard,
Je ne suis plus Colin-Maillard.

• 1Autre titre: Inclination du roi pour Mme de Mailly- Inclination du roi pour Mme de Mailly, femme du colonel de dragons de ce nom. (Lyon BM MS 1553)
• 2C’est le roi qui parle. (M.) (R)
• 3A la strophe suivante Barbier-Vernillat présente une plaisante alternative : Couché près de la vieille Aminthe / Je m'endormis (avec en note: La reine !)
• 4Madame de Mailly. (M.) (R)
• 5La reine. (M.) (R)
• 6Ce couplet‑ci n’est pas de cette chanson : il fait partie d’une autre chantée dans une fête à Luciennes en 1737. (M.) — C’est possible, mais en intervertissant, comme nous l’avons fait, l’ordre assigné aux troisième et quatrième couplets par les manuscrits, ces quatre vers se rattachent parfaitement à l’ensemble de la chanson. (R)