Les auteurs du Journal de Paris1
Cadet, d’Ussieux et Corancez
Sont trois lettrés de conséquence ;
Par qui seraient-ils effacés,
Cadet2 , d’Ussieux3 et Corancez4  ?
Prenez leur journal et lisez,
Vous direz avec assurance :
Cadet, d’Ussieux et Corancez
Sont trois lettrés de conséquence.

Cadet, d’Ussieux et Corancez
Sont tout remplis d’intelligence ;
Peuples savants, applaudissez
Cadet, d’Ussieux et Corancez.
Sont-ils par la crainte poussés ?
Ils critiquent avec prudence.

Cadet, d’Ussieux et Corancez
Montrent quelquefois du courage.
Voulez-vous les voir élancés,
Cadet, d’Ussieux et Corancez,
Contre les auteurs délaissés
Qui ne font ni bruit ni tapage ?

Cadet, d’Ussieux et Corancez,
C’est un plaisir de vous connaître ;
Dites-le, vous qui connaissez
Cadet, d’Ussieux et Corancez.
De l’esprit ils en ont assez
Pour ne pas le faire paraître.

Cadet, d’Ussieux et Corancez,
Oh ! les jolis noms pour l’histoire !
Un jour ils y seront placés,
Cadet, d’Ussieux et Corancez ;
Par eux, les Gacons, les Visés
Verront s’éclipser leur mémoire.
Cadet, d’Ussieux et Corancez,
Oh ! les jolis noms pour l’histoire !

• 1Tandis que l’Angleterre possédait depuis 1702 son journal quotidien, le Daily Courant, la France n’eut le sien qu’en 1777, lors de la publication du Journal de Paris. Dès le mois de novembre 1776, des prospectus détaillés avaient appelé l’attention du public sur cette nouvelle feuille, dont le programme aussi étendu que varié comportait les nouvelles de la ville et de la cour, de la littérature, des beaux‑arts, des théâtres et des fêtes, les questions de science, d’économie politique et de finances, les actes du gouvernement et de ses délégués, le cours des rentes des effets publics, des comestibles et des fourrages. Le premier numéro parut le 1er janvier 1777, et le nouveau journal, en dépit des attaques de ses rivaux, obtint rapidement un grand succès « Un journal de tous les matins, disait Garat, était tellement approprié au goût des Français qu’on ne faisait plus de déjeuner où celui‑là ne fût à côté du chocolat ou du café à la crème » (R)
• 2Antoine Cadet de Vaux, célèbre pharmacien et chimiste français, créa, en 1777, sur les conseils de Duhamel et Parmentier, le Journal de Paris, qu’il dirigea sans discontinuer ses études sur les applications de la chimie aux usages ruraux et domestiques. Il s’occupa également de viticulture, importa en France les comices agricoles et publia un très grand nombre de brochures et de traités scientifiques. (R)
• 3Louis d’Ussieux, littérateur français, dont la collaboration au Journal de Paris commença la réputation, en attendant qu’il se fît connaître par des traductions, des nouvelles historiques et des études d’agriculture. 0n lui doit également une Collection universelle des mémoires particuliers relatifs à l’histoire de France et une Bibliothèque universelle des dames, sorte d’encyclopédie résumée de toutes les sciences. (R)
• 4Olivier de Corancez, employé des fermes, qui consacrait ses loisirs à la culture des lettres, fut un des fondateurs et principaux rédacteurs du Journal de Paris. Il composa un petit volume de poésies, précédé de notices fort intéressantes sur Gluck et sur J.‑J. Rousseau, dans l’intimité duquel il avait vécu. (R)