Chanson légère
Chanson légère1
C’est Cupidon qui m’inspire2
;
Tendres cœurs, accourez tous ;
Jamais l’amoureuse Iyre
Ne rendit des sons si doux
Que mon lanla landerirette
Que mon lanla landerira.
Iris, voici de la Fable
Tous les mystères secrets :
Ce carquois si redoutable,
D’où l’Amour tire ses traits,
C’est un lanla.
Ces bois, ces eaux, ce rivage
D’Amathonte et de Paphos,
Où chaque jour font naufrage
Les sages et les héros,
C’est un lanla.
Ce beau temple de Cythère,
Qu’encensent même les dieux,
N’est de marbre, ni de pierre,
Il est bien plus précieux,
C’est un lanla.
De Troie réduite en cendre,
Quelle fut la cause ? hélas !
C’est que Pâris alla prendre
A ce bon roi Ménelas
Un beau lanla3
.
Diane trop inhumaine
Voulut punir Actéon,
Pour avoir, dans la fontaine,
Vu de trop près, ce dit-on,
Son beau lanla4
.
Ovide, loin d’Italie,
Alla finir son destin,
Pour avoir su de Julie
Dérober un beau matin
Le beau lanla5
.
Connaissez-vous cette flèche
Dont se sert l’Amour vainqueur,
Quand il veut faire une brèche
Dans un jeune et tendre cœur ?
C’est un lanla.
Vénus, divine, adorable,
N’eût point remporté le prix,
Si cette déesse aimable
N’eût fait tâter à Pâris
De son lanla6
.
Jadis, sous mainte figure,
L’on vit descendre les dieux.
Ces maîtres de la nature,
Tous les jours quittaient les cieux7
Pour un lanla.
Les Jeux, les Ris et les Grâces,
Vous accompagnent, Iris,
L’amour marche sur vos traces,
Et pour son trône il a pris
Votre lanla.
Mais peut-on se satisfaire
Toujours de la fausseté ?
Quittons la fable, bergère
Goûtons la réalité
De nos lanla.
Beaux lieux, si dignes de plaire,
C’est sous vos ombrages verts
Qu’enchanté de ma bergère
J’oublierais tout l’univers
Pour son lanla…
- 1Autres titres: Chanson nouvelle et historique - Branle
- 2Par M. le grand prieur de Vendôme, à une fête qu’il donna à M. le duc d’Orléans, à sa maison de Clichy avec Mme de la Vieuville. (M.) — Philippe de Vendôme, (1655‑1727), grand prieur de France, était le frère du célèbre général qui assura par ses victoires la couronne d’Espagne au duc d’Anjou. Après avoir servi quelque temps avec bravoure, il fut disgracié pour sa mauvaise conduite à la bataille de Cassano. Louis XIV mort, il revint à Paris et vécut au Temple, dont il fit le théâtre de honteuses débauches. Il avait un esprit cultivé et beaucoup de goût pour les lettres, mais « c’était, en tout, la plus vile, la plus méprisable et en même temps la plus dangereuse créature qu’il fût possible ». (R)
- 3âris, fils de Priam, roi de la Troade, avait enlevé Hélène, femme de son hôte Ménelas, roi de Sparte. Les Grecs conjurés pour châtier le ravisseur allèrent assiéger la ville de Troie et la détruisirent après dix ans de luttes. (R)
- 4La Fable raconte qu’Actéon fut conduit par les hasards de la chasse près de la fontaine de Parthénie où Diane se baignait. Irritée d’avoir été surprise, la déesse métamorphosa en cerf l’infortuné chasseur, qui fut dévoré par ses chiens. (R)
- 5 Il est possible que l’amour de la petite‑fille d’Auguste pour Ovide ait causé l’exil du poète ; mais l’histoire ne nous a transmis sur ce fait aucune indication précise. (R)
- 6Junon, Minerve et Vénus se disputaient la pomme d’or que la Discorde avait offerte à la plus belle des trois déesses. Pâris fut choisi par Jupiter pour arbitre du différend, et il attribua à Vénus le prix de la beauté. (R)
- 7nature / Se dégoûtaient dans les cieux / De vieux lanla…
Raunié, II,107-09 - Clairambault, F.Fr. 12696, p.27 et 75-76 - F.Fr.9350, f°119v-121r - F.Fr.15131, p.71-77 - Arsenal 2930, p.166-70 - Arsenal 3115, f°148r-149r (manque le dernier couplet) - Arsenal 3131, p.289-91 - Mazarine, MS 2163, p.265-69 - Mazarine 2356, f°1r-1v - Lyon BM, MS 1552, p.160-63
F.Fr.9350 amalgame $150 et $151 jusqu'à J'oubliai tout l'univers, et a probablement raison.