Lettre du P. Sacy, jésuite, au P. Ricci, son général
Lettre du P. Sacy, jésuite,
au P. Ricci, son général
Mon père, je suis confondu
Hélas ! que faut-il vous apprendre ?
Oui, notre procès est perdu ;
Maisons, collège, il faut tout rendre.
Adieu, crédit, argent et or ;
Disons notre Confiteor.
Oui, cet arrêt est foudroyant ;
Il renverse tout l’édifice
Que nous élevions hardiment
Par nos fraudes, nos artifices ;
Le parlement nous donne tort
Disons notre Confiteor.
On ne s’avise jamais de tout,
Dit La Fontaine en ses ouvrages ;
Car en payant la veuve Girou,
On aurait évité l’orage.
Nos bénits Pères ont eu grand tort ;
Disons notre Confiteor.
Nos airs modestes, affectés
Ne rendent plus de bons offices.
Grands et petits sont révoltés
Et connaissent nos artifices.
L’affection a toujours tort.
Disons notre Confiteor.
Bas à Paris, fiers au Pérou,
Nous narguions les plus grands monarques ;
Nous méritons tout leur courroux,
Nous avons renversé la barque :
Nous sommes trop enclins à l’or.
Disons notre Confiteor.
Tous nos dogmes sont infectés,
Ils ne respirent que le crime.
Ce sont eux qui nous ont armés
Contre nos bons rois légitimes :
Ils nous ôtent notre support,
Disons notre Confiteor.
F. Fr. 13651, p.48-50