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Les alleluias du temps

Les alleluias du temps ou 

Chants joyeux sur l’exil

 de M. l’archevêque de Paris

Ce fut par un jour de mardi

Que le grand roi Louis a dit :

Beaumont à Conflans s’en ira

              Alleluia

 

Ce soir même, environ minuit,

Deux mousquetaires lui ont dit :

De par le Roi suivez nos pas.

              Alleluia

 

Que Diable le Roi me veut-il ?

Dit notre bon saint. En exil,

Le Roi vous envoie pour le cas.

              Alleluia

 

Quoi ! sur-le-champ ! quelle heure est-il ?

À demain, Messieurs, leur dit-il,

Il sera jour et l’on verra ;

              Alleluia

 

Suivez-nous, Monsieur, sans façon,

Comme vous êtes. Et pourquoi donc ?

À Conflans on vous le dira.

              Alleluia

 

À ce mot, confus, interdit,

Sur sa chaise il s’évanouit.

Au nez, de l’eau on lui jeta.

              Alleluia

 

Il était avec maint prélat

À table, à prendre son repas,

Quand on vint troubler ses ébats.

              Alleluia

 

À lui quand il fut revenu,

Il s’écria : je suis tondu ;

En mon absence on chantera

              Alleluia

 

Je vois d’où part ce triste coup.

Dites, Messieurs, l’avouerez-vous ?

C’est Maupeou qui m’envoye là.

              Alleluia

 

Vous l’avez dit, Monsieur, c’est lui.

Mais pensez-vous bien qu’il est nuit

Et qu’il faut aller coucher là.

              Alleluia

 

Ah ! permettez qu’auparavant

Adieu je dise à la Moisan.

Si je n’y vais elle en mourra.

              Alleluia

 

Allons, Monsieur, plus de raison ;

Montrez-nous vite les talons.

Nos gens vous attendent là-bas.

              Alleluia

 

Alors avec son bénissoir

Il bénit tout, jusqu’au miroir,

Et d’un air fort dolent il chanta

              Alleluia

 

Puis, s’adressant à ces prélats,

Excusez, Messieurs, ces fracas ;

Persistez, Dieu vous bénira.

              Alleluia

 

Dans un carrosse bien tirant

Qui le conduisit à Conflans,

Le bon archevêque monta.

              Alleluia

 

Les mousquetaires avec lui

Dessus le chemin n’ont rien dit

Jusqu’à ce qu’il arriva.

              Alleluia

 

Aujourd’hui qu’il est à Conflans,

Si Dieu veut, qu’il y soit longtemps.

De joie, un chacun chantera

              Alleluia

 

Par des refus de sacrement

On allait au Ciel tristement ;

À présent tout droit l’on ira.

              Alleluia

 

Sa conscience est avec lui

Et celle des curés aussi,

Car des pauvres gens on dira

              Alleluia

 

Pour calmer son affliction

Il aura mainte mission

Des noirs enfants de Loyola.

              Alleluia

 

Or prions le doux rédempteur,

Qu’il nous accorde le bonheur

De ne plus voir ces gens-là.

              Alleluia

 

Afin que quand le jour viendra

Où chacun de nous s’en ira

On nous laisse aller sans tracas.

              Alleluia

 

Toujours la Constitution

A troublé la dévotion

Qu’on la brûle, et chacun dira

              Alleluia

 

Numéro
$7386


Année
1754




Références

F.Fr.10479, f°398