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La Loterie

La loterie1
Du jeu de la loterie
Bien des gens se font un art ;
Mais leur frivole industrie
Ne peut fixer le hasard ;
En vain la vieille Clitie
Paye cher un numéro,
Elle n’aura qu’un zéro.

J’ai vu la jeune Thémire,
Dupe d’un songe flatteur,
Partager avec délire
La mise d’un beau parleur ;
Mais jugez de son martyre,
Quand le tirage fut fait,
Elle n’eut qu’un pauvre extrait.

Un suppôt de la finance,
Habile calculateur,
Fit croire à la jeune Hortense
Qu’il lui porterait bonheur ;
Malgré la belle apparence
Et leur avide désir,
L’ambe fut longue à venir.

Une gentille vestale
Comptait mal avec ses doigts ;
Pour supputer la cabale,
Elle prit un villageois ;
La fortune libérale
A justifié son choix,
Le terne sort chaque fois.

D’une chance combinée
Par un galant officiel ;
Son épouse consternée
Ne reçut pas un denier ;
Mais elle fut consolée
Par le jeu d’un grenadier,
Qui fit le quaterne entier.

Vous, dont le talent s’intrigue
Pour devenir fortuné
Sans humeur et sans fatigue,
Voilà l’art ; soyez borné.
Le quine que chacun brigue
Peut enfin être amené,
Mais ruine le banquier.

  • 1« On a fait une chanson intitulée la Loterie, lisons-nous dans les Mémoires secrets. Elle est relative à la loterie royale de France et aux différentes chances qu’on y éprouve. Elle circule en ce moment et plaît aux gens qui aiment les polissonneries. » (R)

Numéro
$1576


Année
1786




Références

Raunié, X,213-15 - Mémoires secrets, XXXI, 278-80