Les prélats et la bulle Unigenitus1
Lâches prélats, que l’intérêt domine,
A mauvais jeu vous faites bonne mine ;
Mais
Le ver secret, qui vous mine,
Ne vous quittera jamais.

Vous brillerez pour un temps par vos titres,
Vos cordons bleus, vos chapeaux et vos mitres ;
Mais
N’êtes-vous pas des belîtres
De vous perdre pour jamais ?

Pour nous sauver, messieurs les commissaires,
Indiquez-nous les sentiers nécessaires ;
Mais
Il faut des guides sincères ;
Tellier ne le fut jamais.

Du Saint-Esprit nous adorons le souffle,
Nous respectons le pape et sa pantoufle ;
Mais
Pour la bulle du maroufle,
Nous n’y souscrirons jamais.

Nous révérons l’Église et ses conciles,
A leurs décrets nous sommes bien dociles ;
Mais
A des papes imbéciles
Doit-on obéir jamais ?

L’autorité du pape est justice
Par le dépôt que le Christ lui confie ;
Mais
On souscrit s’il édifie
Et s’il ne détruit jamais.

Le beau décret, le plaisant codicille
Qui nous défend de lire l’Évangile ;
Mais
Si le Saint-Père est fragile
L’Église ne l’est jamais.

Oui, ce décret, que l’erreur accompagne,
Sera prescrit par toute l’Allemagne,
Mais
Baisons-le comme en Espagne,
Enfermons-le pour jamais.

• 1. - Chanson faite à l’occasion de l’assemblée du clergé de France, tenue au mois d’octobre. « Les évêques y demandèrent au roi la permission de tenir des conciles provinciaux pour juger MM. de Bayeux et de Montpellier sur leurs écrits. Il y eut une lettre de la même assemblée au Roi, pour se plaindre qu’on ne leur laisse pas la liberté qu’ils désireraient pour faire main basse sur les appelants. Cette lettre était si séditieuse que, dès qu’elle devint publique, le Parlement ne put se dispenser de la flétrir par un arrêt. » (Abrégé chronologique des principaux événements de la Constitution) (R)