Le Chat de Petitpied
Le chat de Petitpied1
Tapin2
, toi, qui comme un vautour
Fonds sur les jansénistes,
En vain tu devances le jour,
Pour en suivre les pistes ;
Petitpied, sur ton compliment,
Déloge sans trompette
Et te laisse très poliment
Son chat pour amusette3
.
Ce rossignol toujours caché
De crainte du grillage,
Au molinisme très fâché
Échappe de la cage4
,
Pouvant user plus prudemment
Son caustique langage ;
Ainsi, jésuites, à présent,
Craignez-en le ramage.
- 1En 1728, au mois de juin, l’abbé de Lorraine, évêque de Bayeux, étant mort, l’abbé Petitpied, docteur de Sorbonne et directeur de ce prélat, pensa être pris pour être conduit à la Bastille. Voici comme l’affaire se passa. Il demeurait rue du Jour, devant Saint-Eustache, dans une maison qui fait le coin de la rue Montmartre. Il y avait une porte qui donnait dans la rue du Jour et l’autre dans celle de Montmartre. Tapin, exempt, fut chargé de l’arrêter. Il se rendit à cette maison à 11 heures du soir et demanda à parler à M. Petitpied de la part du Prince Charles et sitôt qu’il vit que sa proie était là, il envoya dire au lieutenant de police qu’il tenait l’homme. Celui-ci envoya sur-le-champ un courrier au cardinal Fleury à Compiègne pour lui faire part de cette belle nouvelle. Mais leur joie fut bien courte, car après le compliment de Tapin, cet abbé demanda qu’on lui laissât prendre les livres dont il se sentait avoir besoin et pour cet effet on entra dans son cabinet pour en mettre dans une caisse. L’exempt et le commissaire s’amusèrent à regarder un petit chat qui jouait dans la caisse, pendant lequel temps M. Petitpied passa dans une autre chambre où il y avait une fausse porte par dessus laquelle était une tapisserie et un bureau devant, où étant, il rangea le bureau et après être passé il la retira à lui et se sauva ainsi. Qui fut bien surpris, ce fut Tapin, qui fut chargé d’aller lui-même à Compiègne porter cette nouvelle. On fit sur cela la chanson suivante (Arsenal 2976)
- 2Tapin, exempt de police, s’était chargé d’arrêter l’abbé Petitpied, grand janséniste, lequel en eut avis. Il quitta sa chambre et y laissa son chat qui jouait avec du papier lorsque l’exempt écoutait à la porte et croyait que c’était l’abbé. (M.)
- 3Ce jeune chat est à M. de Chatigny, qui demeure dans la même maison que M. Petitpied. (Arsenal 2930)
- 4« On parle d’une estampe où est une cage, au haut de laquelle il y a un trou d’où sort un petit oiseau, et au bas un chat avec un homme représentant M. Hérault, et avec cette inscription : Les petits pieds ne sont pas pour vous. » (Correspondance de Marais.)
Raunié, V,143-44 - Clairambault, F.Fr. 12699, p.471 (premier couplet) - Maurepas, F.Fr.12631, p.462 (couplet 1) - F.Fr.12674, p.126 -F.Fr.15019, p.25 - F.Fr.12800, p.273 (premier couplet) - F.Fr.13659, p.299 - Arsenal 2930, p.513-14 - Arsenal 2962, p.371 - Arsenal 2976, p.52-54 - Arsenal 3116, f° 82v - BHVP, MS 658, p.76 - Mazarine, MS 2164, p.241-42 - Mazarine MS 2166, p.245-46 (premier couplet) - Mazarine Castries 3984, p.226-27 - BHVP, MS 542, f°12-13 - BHVP, MS 547, (non numéroté) - Toulouse BM, MS 855, f°228
Les deux couplets ne semblent pas traiter du même thème. Ils sont pourtant presque toujours couplés dans les chansonniers.