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Vers sur l'affaire de Mlle Cadière

Vers sur l’affaire de Mlle Cadière
Dieu d’Israël, sois mon refuge,
Combats pour moi, deviens le juge
De mes lâches persécuteurs.
Fais partir, fais gronder la foudre et le tonnerre,
Et que ton bras vengeur montre à toute la terre
Que tu ne délaissas jamais ton serviteur.

Je vois ton glaive redoutable
Levé sur la tête coupable.
Cachez-vous, faibles ennemis,
Le Seigneur en ce jour va prendre ma défense ;
Vous, dont les cœurs pervers oppriment l’innocence,
Traîtres, où fuyerez-vous ? l’enfer même est soumis.

Que la fuite, l’ignominie
Soient le prix de la calomnie
Et de ses suppôts renommés.
Que tel un vain amas de sable et de poussière
Que dissipe des vents une haleine légère,
Leurs complots soient détruits aussitôt que formés.

Vous, les organes de Dieu même,
Vous, de sa justice suprême,
Ministres sages, éclairés
Par vos décisions, par vos arrêts célèbres
Punissez les esprits d’erreur et de ténèbres.
Ils sont contre le ciel hautement déclarés.

En vain ils me tendent des pièges,
En vain leurs fureurs sacrilèges
Soufflent un dangereux poison.
De leur rage impuissante exemplaires victimes,
Ils sont ensevelis dans les mêmes abîmes
Que croyait m’ouvrir leur noire trahison.

Cependant mon âme contente,
De la vérité triomphante
Connaît les salutaires droits.
Ma langue toujours prête à chanter la puissance
D’un juge qui punit, d’un Dieu qui récompense,
Dans ses temples sacrés fait connaître ses lois.

Interprète de ses oracles,
De sa main féconde en miracles
Elle vantera le pouvoir.
Le Seigneur se souvient du pauvre en sa souffrance,
Ses coups sont étonnants et l’humaine prudence
Ne saurait les comprendre et ne peut les prévoir.

Des témoins trompeurs et perfides
Par leurs mensonges homicides
M’imputent un crime odieux.
Touché de leurs erreurs, mon cœur est moins sensible
Aux apprêts éclatants d’un jugement terrible
Qu’au généreux désir de dessiller leurs yeux.

Pour les conduire à la lumière
La patience et la prière
Ont fait des effets superflus.
Toujours plus endurcis ils ont forcé leurs âmes
Par un nouveau tissu d’intrigues et de trames
A braver des remords qu’ils n’éprouveront plus.

Mais tous les desseins que j’ignore
Et que leur haine forme encore
Vont être bientôt dissipés.
Leurs bouches au silence se vont réduire
Sans que jamais leurs cœurs toujours ardents à nuire
Soient réduits à l’aveu d’avoir été trompés.

Seigneur, d’un regard secourable
D’un mortel ennui qui m’accable
Romps de mes meurtriers les troupes conjurées.
Ma voix en s’élevant dans les routes sacrées
Aux peuples attentifs apprendra tes grandeurs.

Ne verrai-je point de l’envie
Qui poursuit ma gloire et ma vie
Avorter l’infâme dessein ?
Sous un dehors trompeur, sous un habit de bure1 ,
Mes suprêmes rivaux méditent l’imposture
Pour lancer sûrement tous leurs traits dans mon sein.

Hypocrites, le masque tombe ;
Qu’il meure, ont-ils dit, qu’il succombe
Sous l’effort de nos bras unis ;
Soutiens-moi, Dieu puissant, fais parler ta justice.
Confonds mes ennemis, toi qui voit leur malice,
Et qui sondes des cœurs les plus secrets replis.

Fais cesser ma douleur profonde,
Il est temps d’annoncer au monde
Qu’on m’a jugé selon tes lois.
Arbitres des humains, l’esprit de Dieu nous guide.
A vos justes décrets cet esprit saint préside,
Vous êtes seulement les échos de sa voix.

Tremblez-vous sous les fourberies ?
Et les cruelles railleries
Se nourrissent d’un faux espoir.
Les barbares auteurs d’un projet fanatique
Pour salaire n’auront qu’un regret tyrannique.
Sous le poids de leur crime, ils seront sans pouvoir.

Mais vous que mon sort intéresse,
Remerciez le ciel sans cesse
Par des cantiques immortels.
Puissent-ils, ces grands cœurs, chanter ma délivrance
Et célébrer, grand Dieu, de ta magnificence
L’éclatante splendeur au pied de tes autels.

Ma voix, d’une force nouvelle
Va de ta justice éternelle
Seigneur, publier les bienfaits.
Tandis que nuit et jour méditant ta loi sainte
Mon âme sans ennui pourra goûter sans crainte
Les fruits de tes faveurs et les dons de la paix.

 

  • 1Charleval (M. juge instructeur

Numéro
$1925


Année
1731 juillet

Auteur
Artaud, jeune homme de Marseille



Références

F.Fr.23859, f°24r-25r


Notes

On attribue ces vers au S. Artaud, jeune homme de Marseille (F.Fr.23859) - Le Mercure d'Août de la même année 1731 reproduit le texte (avec quelques variantes) sous la signature  : "P. L. D. D. R. P. G. J. P. L. A. J.  Il s'agit en fait d'une paraphrase en vers du Psaume 34 (Vulgate) que l'on retrouve dans l'anthologie de Monchablon de 1751 puis dans les éditions qui  s'en inspirent : Garcin, Peigné. Merci à Jean-Michel Noailly de nous avoir apporté ces précisions.