Calotte pour Monsieur Masse, procureur
Calotte pour M. Masse, procureur
Maître Masse le procureur,
Métier qu’il fait avec honneur,
Nous remontre par sa requête
Fort pathétique et fort honnête,
Que sa femme qui boit un peu
Et qui se plaît assez au jeu
Étant par brevet ordinaire
Faite garçon apothicaire
De notre fameux Régiment,
La raison veut présentement
Qu’il ait un poste convenable
À son mérite incomparable,
Étant aussi grand défenseur
Que pouvait être l’assesseur1
*
De Girard, cet excellent homme,
Que toute l’Europe renomme
Et que toujours renommera
Tant que le monde durera,
Nous, commandant de la Calotte,
Ayant pris fort fidèle note
Et bien examiné le fait,
Avons trouvé Masse en effet
Digne de la reconnaissance
Qu’on doit aux hommes d’importance
Et comme il est grand amateur [?]
Nous le nommons notre emboucheur,
Sachant bien qu’en cet exercice
Il nous rendra plus d’un service
Et nous donnera des sujets
Conformément à nos projets ;
Quoiqu’échappé de l’Oratoire
Il est pourtant à tous notoire
Qu’il ne sait pas Jansénius
Armand [?], ni Quesnel, ni Bayus
Qu’il observe bien le carême
Aux dépens de sa santé même,
Qu’il fait maigre le vendredi
Aussi bien que le samedi,
Qu’il a toujours les mains fort nettes,
Payant exactement ses dettes,
Que qui le fréquente est heureux
N’étant pas homme dangereux,
Hâbleur, escroc, vain ni volage,
Mais la personne la plus sage
Qui soit peut-être en l’univers,
Ne donnant dans aucun travers,
Étant toujours d’humeur égale
N’ayant jamais eu mercuriale
Ni de rebuffade au Palais
Du moins qu’il se sache dans Aix
Il n’aime point la comédie,
Le plaisir et la goinfrerie
Il ne fut jamais interdit
D’après ce que le monde dit.
Girard donc, notre apothicaire,
Disposé toujours à bien faire
Doit procurer l’accessorat
À cet admirable avocat2
Qui fait l’honneur de la province
N’ayant jamais eu bonne pince,
Attendant encore dignité
Qu’il a certes bien méritée.
Nous lui donnons grelots, sonnettes,
Avec toutes les girouettes
Qui suivent toujours dans le fond [?]
Bonnet et calotte de plomb.
Fait en l’année mémorable
Qu’on maltraita trois innocents
Et que pour sauver un coupable
On renonça jusqu’au bon sens.
F.Fr.23859, f°156r-157r