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Chanson sur le Père Girard

Chanson sur le Père Girard
Père Girard,
Hélas ! vous êtes bien peu sage.
Père Girard,
Vous êtes un maître paillard.
Vous aimez un libertinage
Qui ne convient point à votre âge,
Père Girard.

Qui l’aurait cru,
Qu’un homme si plein de vertu,
Des scélérats suivît la trace,
Qu’en horreur même il les surpasse,
Qui l’aurait cru ?

Quel scélérat
Commit jamais de si grands crimes,
Quel scélérat
Fit plus de tort à son état ?
Quoi ! Prêcher de saintes maximes
Et se plonger dans les abîmes,
Quel scélérat !

N’est-il pas vrai
Qu’à la faveur du ministère,
N’est-il pas vrai
Que tu jouissais à longs traits
De l’innocente sœur Cadière
Qui, séduite, t’a laissé faire
N’est-il pas vrai ?

Nous t’avons vu
Jadis prêcher la continence,
Nous t’avons vu
Recommander cette vertu.
Mais bientôt à la pénitence
Faire brèche par l’abondance,
Nous t’avons vu.

On le veut bien1 . :
Sois zélateur du moliniste,
On le veut bien.
Ce grand mal aujourd’hui n’est rien
Persécute le jansénisme
Mais renonce au molinisme.
On le veut bien.

Dedans Toulon
Oses-tu bien monter en chaire ?
Dedans Toulon
Oses-tu bien lever le front ?
Ignores-tu que ton affaire
N’est plus aujourd’hui un mystère
Dedans Toulon ?

Que Montauban
T’honore de sa bienveillance,
Que Montauban
T’aime, rien de moins surprenant.
Quel prélat jamais dans la France
Eut moins de bon sens, de prudence
Que Montauban ?

Pour te blanchir
On voit trois magistrats habiles2
Pour te blanchir.
Mais pourraient-ils y réussir ?
Leurs soins en tours si fertiles
Ne peuvent être fort utiles
Pour te blanchir.

Qui ne le sait ?
Quand tu serais plus noir qu’un diable
Qui ne le sait,
Chacun d’eux à ton noir forfait
Sera bénin et favorable
Fusses-tu même plus coupable.
Qui ne le sait ?

D’Argens, Faucon
Sont vendus à la Compagnie
D’Argens, Faucon
De Lebret3 en sait la raison
Va, ne crains point la plaidoirie,
Vis en infâme et remercie
D’Argens, Faucon.

Un bon brevet
Flatte leurs douces espérances,
Un bon brevet
Sera le prix de leur forfait.
Malheur qui tient la balance
Et qui voit pour sa récompense
Un bon brevet.

Pour Charleval,
Prévôt d’un illustre chapitre,
Pour Charleval
Il ne te fera point de mal.
Les appas flatteurs de la mitre
Seront toujours un bon titre
Pour Charleval.

Ne crains plus rien.
Eusses-tu commis plus de crimes,
Ne crains plus rien.
Tes confrères sont ton soutien ;
Par leurs effroyables maximes
Ils te sauveront des abîmes
Ne crains plus rien.

Girard, crois-moi,
Si l’on t’arrache à la potence,
Girard, crois-moi
A la Trappe retire-toi
Que le feu de la pénitence
Cadence du grand Dieu la vengeance.
Girard, crois-moi.

Ignaciens,
N’imitez pas votre confrère,
Ignaciens,
Devenez enfin bons chrétiens,
Tremblez, dans le saint ministère
Suivez la morale sévère,
Ignaciens.

Laissez Girard
A son destin, à la justice,
Laissez Girard,
N’ayez jamais pour lui d’égard.
C’est un scélérat ; qu’il périsse,
Qu’aucun de vous ne soit complice,
Laissez Girard.

Sexe dévot,
Fuyez les directeurs lubriques,
Sexe dévot.
Ils trompent sous leur air cagot
Leurs promesses sont magnifiques,
Mais les fins en sont diaboliques,
Sexe dévot.

  • 1Version de Turin : On le veut bien / Sois un relâché moliniste / On compte ce grand mal pour rien / Mais du moins ne sois pas quiétiste / Non, non, sois plutôt janséniste
  • 2Le parquet du parlement d'Aix.
  • 3Premier président du parlement d'Aix.

Numéro
$1837


Année
1731 (Castries)




Références

Maurepas, F.Fr.12632, p.259-63 - F.Fr.12675, p.38-44 -F.F.12702, p.207-12 -  F.Fr.15132, p.334-38 (manquent les trois derniers couplets-  -F.Fr.15137, p.37-42 -  F.Fr.15243, f°48-49 - F.Fr.23859, f°30r-31v - Arsenal 2934, p.46-54  - Arsenal 3116, f° 123r-125r - BHVP, MS 548, p.16-18 (six premiers couplets) - BHVP, MS 658, II, p.27-32 - Mazarine Castries 3985, p.73-78 (dans le désordre et avec de nombreuses variantes) - BHVP, MS 542, f°104-07 - Lille BM, MS 69, p. 17-25


Notes

Autre version en $4583