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Brevet pour M. de Gueydan, avocat général

Brevet pour M. de Gueydan, avocat général
De par le dieu porte-marotte,
Nous, général de la Calotte,
Comme il est notoire et certain
Que Gueydan par mauvais engin
À fait ses preuves suffisantes
Pour avoir place au Régiment
Et qu’il surpasse nos attentes,
De plus qu’il veut trancher du grand
Quoiqu’issu de vile roture
Et qu’il fit de tout temps rupture
Avec honneur et probité,
Qu’il est pétri de vanité
Et qu’onc du bon sens n’eut teinture
De plus qu’avec l’abbé de Pure
Dans la fange il s’en va rampant
Soit haranguant, soit en plaidant,
Que par esprit de jalousie
Son lâche cœur plein d’ineptie
Aima mieux perdre l’innocent
Et sauver le loup ravissant
Qu’opiner comme fait son frère
Qu’à son grand regret l’on révère,
Qu’on compte parmi ses exploits
Que s’il sut changer d’avis deux fois
Sans qu’il en eut la moindre honte,
Que plus matériel que fonte
Il fait le petit Trissotin
Et même parfois le badin,
Que plus à craindre que vipère
Il médit de son propre père
Qu’il est pour tout dire en un mot
Tout aussi pervers qu’il est sot.
À ces causes et plusieurs autres
Le recevons parmi les nôtres,
Et voulons dans le même instant
Qu’il soit de notre Régiment
L’orateur en titre d’office.
Et comme dans un tel service
Il se pourrait qu’il eût besoin,
Étant trop pressé, d’un adjoint,
Il pourra (dût-on en médire,
S’en gausser ou bien même en rire)
A l’ami Chaillot recourir
Pour à son travail subvenir.
Lui remettons notre médaille
De la première et grande taille.
Au surplus nous lui faisons don
De triple calotte de plomb,
Grelots, papillons et sonnettes
Chauve-souris et girouettes
Et lui cédons cent mille francs
À pouvoir prendre tous les ans
Sur le revenu plus qu’immense
Du royaume de suffisance.
Fait et publié ledit jour
Que sans façon et sans détour
Le juge se montrant partie
Hardiment sollicite et prie.

 

Numéro
$1985


Année
1731 septembre




Références

F.Fr.23859, f°62 - Turin, p.136-38