Fable allégorique sur les disputes du temps
Fable allégorique sur les disputes du temps
Deux hommes d'un profond savoir,
Philosophes sans doute et j’en ferais gageure,
Parlaient de Jupiter, expliquaient sa nature,
Et quoiqu’ils n’y pussent rien voir,
Ils analysaient son pouvoir
Sur la fragile créature.
L’un disait que sans lui l’homme ne pouvait rien,
Que c’était une erreur extrême
De croire que sans son moyen
Un mortel jusqu’au Ciel pût s’élever lui-même.
L’autre lui soutenait qu’il était dans l’erreur,
Et que l’homme pouvait par une sainte audace
Sur l’Olympe éternel aller prendre sa place
Pourvu qu’il eût assez de cœur,
Mais que pour cet effort il lui fallait des ailes
Et que Jupiter seul pouvait les lui donner ;
Que dans ses bontés éternelles,
Dans ce sublime vol qui doit nous étonner,
On voyait échouer les vanités mortelles ;
Que pour punir alors cet homme audacieux
On le verrait bientôt ainsi qu’un autre Icare,
Sur des ailes de cire osant tenter les cieux,
Précipité dans le Tartare.
Le souverain des dieux paraissait indigné
Et Momus ne pouvant se retenir d’en rire
Ventre-saint-gris, dit-il, ils ont tous deux gagné.
Donnez-leur à chacun place dans votre empire,
Car leur système, en clair et net,
C’est bonnet blanc et blanc bonnet.
Clairambault, F.Fr.12701, p.363-64 - Maurepas, F.Fr.12633, p.129-30 - Arsenal 2962, p;383-384 - Gastelier, IV,1, p.192
Un très rare texte ne tranchant pas entre les deux doctrines.