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Le molinisme dévoilé

Le molinisme dévoilé

Ode

D’où vient le feu qui m’anime ?

Au combat contre l’erreur,

Des douceurs du molinisme

J’ai plus que jamais d’horreur.

Est-ce l’esprit de satire

Qui me met d’humeur d’écrire

Sans entendre la raison ?

Non, mais la charité même

Qui ne peut voir ce qu’elle aime

Se nourrir d’un vrai poison.

 

La probabilité

De ton sein, doux molinisme,

Sort le dogme gracieux

Par qui le christianisme

N’a plus rien de rigoureux ;

Tu te charges de nos dettes,

Tu réformes les préceptes

Positifs et naturels.

En deux sens tu les partages,

Puis tu dis sur les suffrages

S’ils sont vides du réel.

 

La science moyenne

Tels que les fils de la terre

Qui triomphèrent des dieux,

Fier, tu descends de leur sphère,

Chargé du trésor des cieux.

A présent nos destinées

Se trouvent abandonnées

Au libre arbitre de tous.

Dieu les voit par conjecture ;

Encore ta bonté pure

Lui laisse ce droit sur nous.

 

La grâce suffisante

A combien d’autres mystères

Sommes-nous initiés

Depuis que par tes lumières

Les cieux sont humiliés ?

Du sauveur et de sa grâce

Ton système prend la place ;

Sans eux se sauve qui veut ;

Tu détruis dans l’Évangile

La loi sévère et stérile

Qui nous dit sauve-qui-peut.

 

L’équilibre

Faiseur des plus grands miracles,

Sans toi l’homme est toujours fort,

Il peut, malgré tous obstacles,

Sûrement venir au port.

Il n’est démon ni délices,

Il n’est passions ni vices

Qui l’en puissent éloigner,

Car ta grâce qui l’escorte,

Toujours lui prête main forte

Quand il daigne l’employer.

 

Le péché philosophique

Par toi la crasse ignorance

De notre premier devoir

Est de l’état d’innocence

Un très fidèle miroir.

Dans une chair misérable,

Ne craignant ni Dieu ni Diable,

Tout le mal qu’on fait n’est rien,

Parce que le franc arbitre

N’est pas coupable à ton titre

S’il ne voit clair dans le bien.

Numéro
$6290


Année
1732




Références

F.Fr.10476, f°352r-353r - F.Fr.12800, p.255-57 - Arsenal 2976, p.188-90