A Madame de Moysan1
En vain la Calomnie a broyé ses couleurs
Pour faire de Moysan un portrait infidèle.
On remarque aisément la main du faux Apelle,
Et de son clair-obscur on connaît la noirceur.
Voilà donc le pouvoir d’un zèle fanatique :
La Charité n’est pas la vertu du parti ;
Mais il devrait du moins craindre le démenti
Et sur des faits certains établir sa critique.
Non, c’est connaître mal ce parti dangereux,
Il pense avoir le droit de juger les justices.
Fêtez Jansénius, vous serez vertueux,
En recevant la Bulle, on reçoit tous les vices.
Voilà le vrai tarif de tous ses sentiments :
Il parle sans respect, sans pudeur, sans décence,
Et fronde également l’une et l’autre puissance.
La seule passion règle ses sentiments.
Étrange illusion ! que je plains tes victimes !
A quels tristes excès tu conduis leurs esprits !
Tu corromps leurs discours, tu ternis leurs écrits,
Et pour venger le Ciel tu leur permets des crimes.
Moysan, consolez-vous d’être en butte à ses traits,
Sa constante fureur vaut un panégyrique.
On connaît maintenant son zèle évangélique,
Ce zèle que saint Paul ne pratiqua jamais !
Chez la postérité, ces Annales publiques
Qui, depuis si longtemps scandalisent Paris,
Ne seront tout au plus que de vieilles rubriques
Propres à réveiller nos justiciers mépris.
Soyez aimée autant qu’aimable,
Montrez-vous toujours secourable
A tant de malheureux confiés à vos soins :
L’attention à leurs besoins
Fera taire la Calomnie,
À vos accusateurs laissons l’ignominie.

• 1Voici une épître inédite jusqu’ici, qui lui fut adressée au mois de juillet 1750. C’est une réponse à la satire de Nicolas Jouin [$1080]. Nous la donnons également en entier ; il convient que l’on puisse comparer le ton des deux pièces. Nous ne l’avons pas choisie pour les besoins de la cause : elle est unique en son genre. S’il a existé d’autres textes favorables à Mme de Moysan, ils ont disparu (Henri Legier Desgranges).