Apologie de Monsieur Tencin
Voilà donc Tencin, Dieu merci,
Bien lavé de ses crimes
Un petit bref vaut en ceci
Mieux que mille victimes.
Ne parlons plus de ses forfaits,
N’attaquons plus sa gloire,
Admirons les divins effets
De son bref sanatoire.

Vous qui maudites ce Simon,
Fameux par le grimoire,
Que ne lui faisiez-vous le don
D’un bref sanatoire ?
Pierre, n’aviez-vous pas le droit
Que Benoît fait paraître ?
Notre Tencin, par quel endroit
Vaut-il mieux que son maître ?

Comparons pour passer le temps
Ces deux chrétiens ensemble.
En quel point sont-ils différents ?
Qu’ont-ils qui se ressemble ?
Simon voulait pour confirmer
La crosse épiscopale,
Tencin veut afin de primer
La pourpre cardinale.

Simon avec fruit écouta
Un diacre fidèle,
Tencin sans fruit persécuta
Un prélat plein de zèle.
Simon présenta de l’argent
Au prince des apôtres,
Tencin, lassé d’être indigne,
En dépouilla les autres.

Simon fait un péché, Céphas
D’anathème le frappe,
Tencin de cet horrible trait
Est lavé par le pape.
Simon n’avait pas le cœur droit,
Pierre l’a fait connaître.
Ah, que Tencin par cet endroit
Est digne de son maître.

Pierre à Simon fit un devoir
De faire pénitence,
Benoît pour Tencin fait voir
Beaucoup plus d’indulgence.
Simon demanda, plein de foi,
Les prières de Pierre.
Tencin, sans honneur, sans foi,
Déclare aux saints la guerre.

Simon se mêla d’un métier
Qu’on appelle magie,
Tencin n’est pas un grand sorcier,
Même en théologie.
Houdard pourrait sur ce sujet
Nous dire quelque chose,
Car les discours que Tencin fait,
C’est lui qui les compose.

Les Samaritains regardaient
Simon comme un oracle
Et chaque jour on attendait
Quelque nouveau miracle,
Tencin, dans la ville, dit-on,
N’acquit pas grande gloire.
Mais il vient d’illustrer son nom
Par un bref sanatoire.