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Dubois et la constitution Unigenitus

Dubois et la Constitution Unigenitus
Or admirez, peuple françois,
L’adresse de l’abbé Dubois
Ses intentions il déguise :
Car ce bon père de l’Eglise
Fait disperser plusieurs savants
Pour éclairer les ignorants.

On n’a plus besoin dans Paris
De tous ces beaux et bons esprits,
Mais il en faut dans la province,
Où gens oiseux, de savoir mince,
Ont de la Constitution
Une sotte prévention1 .

Donc à Villeneuve-le-Roi
D’Asfeld2 s’en va prêcher la foi ;
Vers Tulle, Rollin l’on dépêche ;
C’est à Quimper que Begon prêche,
Car c’est prêcher la vérité
Que d’être ainsi persécuté.

Outre ces trois graves docteurs3 ,
Plusieurs autres iront ailleurs,
Et partout sauront de la bulle
Au jour mettre le ridicule,
Quand partout les verrez courir
Pour n’avoir pas voulu mentir.

Quand chacun d’eux arrivera,
Tout le peuple s’informera
Quelle a pu donc être l’offense
Des gens de si sainte apparence
Il faudra, pour le contenter,
Toute l’histoire raconter.

La bulle du pape Clément
Condamnait indifféremment
Le langage et la foi des pères.
Ces gens, dit-on, par trop austères ;
N’ont jamais pu l’abandonner
Dans leur manière de parler.

Des prélats s’étaient contentés
De croire au fond les vérités,
Sans s’embarrasser du langage
Qui de tout temps est en usage,
Mais ceux-ci veulent qu’un chrétien
Sur la foi ne gauchisse en rien.

Or l’on trouve à redire en eux
De ce qu’ils sont si scrupuleux,
Qu’ils prétendent qu’en conscience
Chacun doit parler comme il pense,
Et que c’est trahir son devoir
De dire que le blanc est noir.

Les peuples, s’ils ne sont oisons,
Applaudiront à leurs raisons,
Qu’ils trouveront belles et bonnes
Puis s’attachant à leurs personnes
Diront tous sans exception :
Fi de la Constitution !

Or prions le doux Rédempteur
Du plus profond de notre cœur
Pour que de ces saints missionnaires
Puissent les travaux salutaires
Faire honnir de plus en plus
Cette bulle Unigenitus.

  • 1L’avocat Barbier écrit dans son Journal au mois de mars : « L’affaire de la Constitution paraissait être assoupie depuis l’enregistrement du Parlement et les ordres de M. le Régent de n’en plus parler ni écrire ; elle est plus réveillée que jamais. Il a paru une petite liste imprimée contenant les noms de deux cents personnes, qui ont appelé de la Constitution tout nouvellement. M. Baudry, lieutenant de police, en manda dix, dont l’abbé d’Asfeld était le premier. Il leur demanda s’ils avaient ce petit livre ; qu’ils savaient là‑dessus l’intention du roi et de M. le Régent. Ils répondirent qu’oui ; qu’au surplus le roi était maître de leurs biens et de leurs personnes ; mais qu’il ne pouvait point les contraindre à pécher, et que le silence où ils demeureraient seraient un péché. » Dubois décidé à poursuivre ces récalcitrants dont l’opposition ne pouvait que retarder sa nomination au cardinalat, exila les plus notables d’entre eux. (R)
  • 2L’abbé d’Asfeld, dont le nom figurait le premier sur la liste alphabétique des nouveaux appelants, avait été d’abord exilé à la Rochelle, puis à Auxerre. « Il a obtenu dit Marais, un changement de son exil et est envoyé à Saint‑Florentin. Depuis, cela a encore été changé, et on l’envoie à Villeneuve‑le‑Roi, où l’air est meilleur. » (R)
  • 3« Les lettres de cachet volent partout contre les renouvelants. M. Lefèvre, docteur de Sorbonne, est relégué à Tréguier ; M. Begon, à Quimper ; M. Rollin, dénonciateur de M. de Soissons, à Tulle ; M. Tabourin, à Luçon, M. Maillard, à Dol ; le P. Goffard, de l’Oratoire, à Aire ; le P Boyer, aussi de l’Oratoire, à Rodez. »(Journal de Marais. — Voir, à ce sujet, la pièce qui a pour titre l’Exil des nouveaux appelants. (R)

Numéro
$0450


Année
1721avril




Références

Raunié, IV,31-34 - Clairambault, F.Fr.12698, p.27-29 - Maurepas, F.Fr.12630, p.355-57 - F.Fr.15019, f°213 (incomplet)