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La Trêve des partis

La trêve des partis1
Le roi, notre sire,
De certains prélats,
Ardents pour écrire,
Voyant les combats,
Impose silence
Sur le décret suspendu2 ,
Lanturlu, lanturlu, lanturlu.

Bissy, à la tête
D'un parti puissant,
A troubler s'apprête ;
Et le beau Rohan ;
On les a fait taire3 ,
Et tout schisme est défendu.

Pour bannir de France
Leurs cris furieux,
Par grande prudence,
D'Aguesseau le pieux,
A scellé des lettres,
Dont Chut est le contenu.

Apprenant l'affaire,
Le nonce romain,
Qui, pour le Saint-Père,
N'a rien fait qu'en vain,
Repliant la bulle,
A crié comme un perdu.

Rempli d'un doux zèle,
Notre cardinal
Croit que sa querelle
Ne va pas trop mal :
Tout sera paisible,
Chez nous, a-t-il répondu.

A l'oeil ayant larme,
Le fin Bas-Normand4 ,
Qui sonnait l'alarme,
Dit amèrement :
Tocsins inutiles,
Vous n'êtes plus entendus.

Craignant le ravage
De gens portant froc,
La Régence sage,
Met la bulle au croc ;
L'édit de silence,
A tout mal a bien pourvu.

Après l'ordonnance,
L'appel principal
Qu'avait fait d'avance
Notre cardinal5 ,
Transcrit à Lectoure,
Par aventure a paru.
Lanturlu, lanturlu, lanturlu !

  • 1Autres titres: Sur l'édit qui imposait silence sur la Constitution (Arsenal 2930) - Sur la déclaration du 7 octobre 1717 qui impose silence sur le fait de la Constitution Unigenitus (Arsenal 2961)
  • 2Par une déclaration du roi en date du 7 octobre, le Régent, que les troubles suscités par la Constitution commençaient à inquiéter, informa les partisans et les adversaires de la bulle qu’il venait d’entamer des négociations avec la cour de Rome, et défendit, pendant le cours des instances ouvertes auprès du Saint‑Siège, toute nouvelle dispute sur les questions en litige. « Le feu roi, notre très honoré seigneur et bisaïeul, disait le préambule de cet acte, nous ayant laissé ce royaume dans une heureuse paix avec toutes les puissances de l’Europe, nous n’avons eu qu’à suivre et à affermir ce dernier ouvrage de sa profonde sagesse ; mais nous ne remplirions qu’imparfaitement les devoirs de la royauté, si nous ne travaillions avec autant d’attention à rétablir une autre espèce de paix non moins importante pour le bonheur et la tranquillité des peuples soumis à notre domination en apaisant ces troubles intérieurs dont le clergé de notre royaume est agité au sujet de la bulle donnée par notre Saint‑Père le Pape. » (R)
  • 3La déclaration du roi fut rendue en pure perte et ne fit taire personne. Jésuites et jansénistes, s’offensant également de ce silence imposé aux partisans de l’erreur et à ceux de la vérité, continuèrent leurs vaines discussions. (R)
  • 4Le P. Le Tellier, qui publiait avec le P. Doucin les brochures anti-jansénistes intitulées Tocsins. (R)
  • 5L’appel fait par le cardinal de Noailles, le 3 avril fut publié en décembre 1717 sans le consentement de l’auteur. C’étaient les jansénistes qui l’avaient imprimé furtivement. En vertu de la déclaration du 7 octobre, un arrêt du Parlement (1er décembre) ordonna la suppression de cet acte. (R)

Numéro
$0211


Année
1717 (Castries)




Références

Raunié, II,261 - Clairambault, F.Fr.12696, p.293-95 -Maurepas, F.Fr.12629, p.97-99 - F.Fr.15131, p.116-19 - Arsenal 2930, p.210-13 - Arsenal 2961, p.415-18 - Arsenal 3115, f°158r-159r - Arsenal 3132, p.311-13 (moins la dernière strophe) - Arsenal  3115, f°158r-159r - F.Fr.12673, p.244-46 - Mazarine, MS 2163, p.306-09 - Mazarine Castries 3982, p. 72-74 - Toulouse BM, MS 855, f°103r-104r - Barbier-Vernillat, III, 45-46