Aller au contenu principal

Remerciement des jansénistes aux avocats de Paris pour leur consultation

Remerciement des jansénistes aux avocats de Paris1
Chantons2 , chantons des avocats
La gloire non pareille,
Contre nos seigneurs les prélats,
Leur plume fait merveille.
En vain Rome dans son courroux
Proscrit notre Évangile,
Trente avocats sont plus pour nous
Qu’un pape et qu’un concile.

Nous avons des prélats, des rois
Balancé la puissance ;
Mais trente avocats par leur poids
Font pencher la balance.
Partout, quoiqu’on lève le bras
Pour nous réduire en poudre,
Il ne faut que trente avocats
Pour écarter la foudre.

Qu’on n’écoute donc plus sans choix
Des pasteurs le suffrage,
Un factum sur toutes leurs voix
Remporte l’avantage.
Esprit saint, malgré ton pouvoir,
Ta sentence est informe,
S’il plaît aux avocats d’y voir
Un défaut dans la forme.

Colbert et Caylus, à présent3 ,
Vous n’avez qu’à vous taire ;
Sans vous nous pouvons sûrement
Nous bien tirer d’affaire.
Vous avez en braves soldats
Commencé la défaite,
Mais il fallait trente avocats
Pour la rendre complète.

Vos savantes instructions
Ne sont plus à la mode,
On va dans les religions
Suivre une autre méthode.
Il ne faut dans tous les États
Pour prévenir le schisme,
Que faire par trente avocats
Signer un catéchisme.

Sur ce modèle apparemment,
Au ciel comme sur terre,
On aura fait un changement
A l’égard de Saint Pierre ;
Quand nos élus arriveront,
S’il leur ferme la porte,
Trente avocats s’y trouveront
Pour leur prêter mainforte.

Admirons la simplicité
Des anciens hérétiques ;
Que leur en aurait-il coûté
Pour être catholiques ?
Bonnes gens, ne pouviez-vous pas,
Sans autre procédure,
Citer pour vous des avocats
Au lieu de l’Écriture ?

Poursuivez donc vos ennemis,
Arbitres de l’Église,
Aujourd’hui tout vous est permis ;
Et, quoi que l’on en dise,
Comme Normand4 , en plein Sénat,
Bernez le premier ordre,
Et faites voir qu’un avocat
Sait aboyer et mordre.

Des frères tailleurs, des nonnains
Et des maîtres d’école,
Même à leur tour des médecins
Ont bien joué leur rôle ;
Mais au public ne voulant pas
Laisser reprendre haleine,
Nous députons trente avocats
Pour amuser la scène.

 

  • 1Autres titres :Chanson nouvelle sur les avocats qui ont signé la fameuse Constitution. - Sur le concile d'Embrun
  • 2Le nom de l’auteur suffit pour indiquer le caractère de la pièce, c’est une raillerie fine et judicieuse de la consultation des avocats. (R)
  • 3Luther et Calvin, à présent / Vous nous laisserez faire ;
  • 4L'un des avocats qui avait signé la consultation.

Numéro
$0643


Année
1727 (Castries) / 1728 / 1730

Auteur
Du Cerceau (le P.) jésuite



Références

Raunié, V,138-41 - Clairambault, F.Fr.12699, p.445-447bis - Clairambault, F.Fr.12701, p.309-11 -Maurepas, F.Fr.12631, p.435-38 -  F.Fr.12674, p.127-31 -F.Fr.12800, p.311-14 - F.Fr.13655, p.251-53 - F.Fr.13660, f°81-82 et f°104-05 - F.Fr.15020, f°1118v -  F.Fr.15132, p.178-83 - Arsenal 2391, f°123v-126r - Arsenal  2976, p.39-42 - Arsenal 3116, f°76r-77v - BHVP, MS 658, p76-80 - BHVP, MS 703, f°42r - Mazarine, MS 2164, p.255-60 - Mazarine Castries 3984, p.222-25 - BHVP, MS 542, f°3-7 - BHVP, MS 547, (non numéroté) - Glaneur historique, 27 mars 1731