La Promotion des officiers généraux
La promotion des officiers généraux1
Fleury2
qui ne s’entend à rien
Et son adjoint3
encore moins,
Entre eux ont décidé la guerre
Laire lan laire.
Après avoir bien griffonné
Et par cent fois recommencé,
La promotion ils ont fait faire4
.
Quand Bouyn5
l’a remise à Louis,
Il lui dit d’un air tout surpris :
Comment sitôt l’ont-ils pu faire ?
— Hélas ! sire, je n’en sais rien,
Votre Majesté le sait bien,
Je n’en suis que le secrétaire.
Le cardinal m’a ordonné
De vous défendre d’en parler ;
Jusqu’au chenil il faut vous taire.
Seulement pour vos courtisans
Vous pourrez bien dans ce moment
De l’enveloppe vous défaire.
Quand à la Muette6
vous serez,
À l’aise dégoiserez
Et ferez part de ce mystère.
A la Muette étant arrivé,
Le roi a dit : Amis, lisez,
Ma foi, je ne m’y connais guère.
Les courtisans tout ébahis,
En riant ont dit à Louis :
Hélas ! quel secours pour la guerre !
Mouchy, Chabot et le Nonant7
Sont tous trois fort jolis enfants,
L’ennemi connaît leur derrière.
Sire, en cette promotion,
Belle-Isle, aidé de Polastron8
,
Ont bien montré leur savoir-faire.
Il faut sans doute aveuglément
Se livrer à l’arrangement
Que ces messieurs font pour la guerre.
Bénissons donc cent et cent fois
Le choix de notre auguste Roi
Pour son conseil et pour la guerre.
Il prendra Vienne assurément
Si personne ne le défend,
Mais nous aurons les étrivières.
Laire lan laire.
- 1« La promotion d’officiers généraux a enfin paru le 10 de ce mois. Il n’y a point de maréchaux de France et il y a quelque raison pour cela. Le roi a fait vingt-cinq lieutenants généraux et cinquante-six maréchaux de camp et plus de quatre vingts brigadiers. Cette promotion a fait plus de mécontents que d’autres, aussi a t elle été chansonnée vivement » (Journal De Barbier, mars.)
- 2Louis qui ne (Barbier)
- 3Le garde des Sceaux Chauvelin. (R)
- 4Ce couplet manque dans tous les Chansonniers ; nous l’avons emprunté, ainsi que le dernier, au texte donné par le Journal de Barbier. (R)
- 5Le secrétaire d’État de la guerre, M. Bouyn d’Angervilliers. (R)
- 6La Muette, au bois de Boulogne, où le roi va souper avec des seigneurs. (Note de Barbier.) (R)
- 7Philippe de Noailles, duc de Mouchy, colonel du régiment de Noailles dans la guerre de 1733, et maréchal de France en 1775 ; — Guy Auguste de Rohan‑Chabot, lieutenant général des armées du Roi ; — Philippe-Charles II d’Estampes, fils du comte d’Estampes et de Jeanne‑Marie Duplessis Châtillon de Nonant. (R
- 8ean‑Baptiste, comte de Polastron, maréchal de camp et gouverneur de Castillon. (R)
Raunié, VI,74-76 - Clairambault, F.Fr.12705, p.101 - F.Fr.12675, p.119-21 (8 premières strophes) -Maurepas, F.Fr.12633, p.257-59 (variantes) - F.Fr.15137, p.123-25 - F.Fr.13661, f°227r-227v - F.Fr.15147, p.41-45 - Arsenal 2934, p.141-43 incomplet - Arsenal 2938, f°107r - BHVP MS 554, f°353r-354r - BHVP, MS 659, p.288-91 (moins le dernier couplet) - Mazarine Castries 3986, p.66-70 (moins le dernier couplet) - - Stromates, I, 444-46 - Barbier, II, 468-70