Chanson guerrière
La trompette sonne
Et le tambour bat,
Enfants de Bellone,
Volez au combat ;
Partez d’abord avec audace,
Sur l’ennemi courez serrés,
Surtout point de grâce ;
Morbleu, massacrez !
En France, on s’engage
De fort bonne foi :
C’est un avantage
De servir le Roi.
Partons d’abord avec courage,
Culbutons tous nos ennemis.
Meure qui outrage
Notre roi Louis !
Tous les jours un mille
Partent de Paris,
Et, quittant la ville,
Chantent par leurs cris :
De l’argent sans peine
Nous avons comptant ;
Des louis par centaine
On gagne à Milan.
Toute l’Allemagne
Dessous d’Asfeld1
pleure,
Et si l’on gagne,
Adieu l’Empereur.
Partout la victoire
Suit le grand Cogny,
On met dans l’histoire :
Tout tremble sous lui.
Notre illustre père,
Le roi Stanislas,
Bat son adversaire
Dans tous les combats2
;
Les Polonais font un carnage
Du Moscovite et du Saxon ;
Et tout rend hommage
Au bruit de son nom.
Madame Czarine3
Qui met tout en train,
On voit à sa mine
Qu’elle n’aura rien
Que le mauvais désavantage
D’avoir été souvent battue,
Grand Dieu ! quel dommage
Pour tant de vertu !
- 1Claude‑François Bidal, marquis d’Asfeld, lieutenant général des armées du Roi et directeur général des fortifications de France, reçut le commandement de l’armée d’Allemagne, à la mort du maréchal de Berwick, comme étant le plus ancien des lieutenants généraux. Il fut aussitôt créé maréchal de France. « Ceux qui ont servi sous lui est‑il dit dans la Vie privée de Louis XV, nous le peignent comme un homme blanchi dans le métier des armes, et qui, artisan de sa fortune, était parvenu à la tête du génie qu’il n’entendait cependant pas parfaitement ; indécis, sans plan fixe, n’agissant qu’à mesure, ne sachant pas assez profiter des avantages que sa position ou celle de l’ennemi pouvait lui donner. » (R)
- 2Le chansonnier était mal informé, Stanislas, assiégé dans la ville de Dantzick par l’armée moscovite, vit sa tête mise à prix, il dut s’échapper le 27 juin, déguisé en matelot, et se rendit à Kœnigsberg, dans les États du roi de Prusse. (R)
- 3La Czarine, avec l’appui de l’Empereur, avait fait élire Auguste III roi de Pologne ; elle était intéressée, par amour-propre, à continuer au fils la protection que Pierre le Grand avait accordée au père. (R)
Raunié, VI,83-85 - F.Fr.12675, p.114-18 - F.Fr.15134, p. 612 -F.Fr.15137, p.118-22 - Arsenal 2934, p.137-40- BHVP, MS 542, p.246-47 - Mazarine MS 2164, p.411