Sans titre
Or, écoutez, petits et grands1 ,
L’histoire du chef des merlans2
Qui s’est joué, l’infâme traître,
Des jours de son roi, de son maître
Et faillit à nous perdre tous
Pour complaire à Madame Enroux3 .
Son vrai nom est fort peu connu,
De ceux même qu’il a tondus,
S’étant masqué d’un nom de guerre
Comme Brin d’amour, Marche à terre,
Francoeur, la Ramée, Sans souci,
La Peyronie il a choisi.
Gigot4 au second rang brilla,
Mais au premier il s’éclipsa
Quand l’ambition qui le mine
L’eut instruit dans la médecine,
Il taillait, il saignait si bien;
Que ne restait-il chirurgien !
L’on dit que Père Le Tellier5 ,
Passant jadis par Montpellier,
Fit connaissance de sa mère
En l’absence de Gigot père
Qui s’avoua père cornard
Quand il vit naître ce bâtard.
Le vrai pater qui l’engendra
Pour héritage lui laissa
Son double esprit, sa manigance,
Des parlements la méfiance,
Son goût pour les nouvelles lois
Et sa souplesse auprès des rois.
A la guerre, il y a déjà eu
Deux premiers chirurgiens pendus.
Gigot n’est pas plus honnête homme
Qu’il soit traité tout ainsi comme.
Toute la France applaudira
Et le bon roi Louis vivra.
- 1Les médecins de Paris, qui enragent contre La Peyronie, ont fait même un chanson contre lui à ce sujet, qui est vive (Babier)
- 2Il est chef des perruquiers qu'on appelle merlans parce qu'ils sont blancs (Barbier) Dans le cadre de la polémique suscitée par la maladie du roi à Metz.
- 3La duchesse de Châteauroux.
- 4C'est son nom.
- 5Confesseur de Louis XIV.
Clairambault, F.Fr.12712, p.215-18 - Maurepas, F.Fr.12647, p.395-96 - F.Fr.10288 (Barbier), f°178r-180v - F.Fr.10477, f°160 - F.Fr.12682, f°46v-47r - F.Fr.15231, f°288r-289r - F.Fr.13656, p.313-14 - NAF.9184, p.388-89 - Barbier, III, 537 (premier couplet)