Lettres patentes concernant la Calotte
Lettres patentes concernant la Calotte
Nous, Général de la Calotte,
Poussés de la même marotte
Qu'avaient les Grecs et les Latins
Pour perpétuer leur mémoire,
Afin de conserver la gloire
Du Régiment des calotins,
Voulons qu'on frappe une médaille
Qui fasse nargue à l'antiquaille,
Et dont la face et le revers
Ornés de symboles divers,
Que porte la gent calotière
Instruise la race dernière
Du mérite des Calotiers,
Autrement frères de la joie.
Nous ordonnons au Sieur Roetiers,
Le graveur de notre monnaie,
De graver avec beaucoup d'art
Le grand Dieu Momus d'une part,
Assis sur un léger nuage,
Et montrant un riant visage
Avec ces beaux mots à l'entour,
C'est régner que de savoir rire.
Mots que la Ville et que la Cour
Devraient à tous moments relire.
Quant au revers, on y verra,
Autant que l'Art le permettra,
Le noble écu de la calotte
Portant en pal une marotte
En champ semé de papillons,
Les plus légers des oisillons.
Le chef, comme noble partie,
Aura la lune dans son plein,
Cet astre, qui du genre humain
Règle la conduite et la vie,
Dont les croissants aux deux côtés
Marqueront les variétés.
Une calotte à double oreille,
Conservant le chef à merveille,
Servira de timbre à l'écu.
Sur ce casque plein de vertu
D'où pend maint grelot et sonnette,
Sera plantée une girouette
Légère et tournante à tout vent,
Ayant au pied un rat passant,
Pour lambrequins1
une fumée
D'un des plus fins brouillards formée.
Deux singes puissants et gémeaux
Feront à côté les suppôts ;
Mais quoique pareils en nature,
Ils seront divers en vêture.
L'un portera manteau, collet,
L'autre la botte et le plumet,
Images de gent occupée
Tant à la robe qu'à l'épée.
Enfin pour devise et pour cri,
On y lira ce grand vers-ci,
La lune nous conduit, Momus nous favorise,
Vers renfermant doctrine exquise,
Et duquel vers tout calotin
Se souviendra soir et matin.
Voulons de plus que chaque frère
Porte le susdit médaillon,
Tant en or, qu'argent, bronze ou plomb,
Du côté de la boutonnière.
Entendons que tout cordon bleu,
Noir, rouge ou de couleur bizarre,
Tel que celui de Saint Lazare,
Se dira par un noble aveu,
Frère de la chevalerie,
Surtout dans les temps de frairie2
,
Temps auquel l'aimable Comus,
Suivi de Bacchus et Cythère,
Ordonne de la bonne chère
En maître d'hôtel de Momus.
Sur ce, mes chers frères, je prie
Le grand Dieu de la raillerie,
Qu'il vous donne joie et santé.
Le tout conclu, fait, arrêté
Dans notre grand chancellerie,
Au mois que la fève est fleurie3
;
Scellé, signé de notre nom,
De Torsac et par moi, Aymon.
1725, I, 7-10 - 1726, 4-6 - 1732/1735, I, 13-15 - 1752, I, 13-15 - F.Fr.9353, f° 65r-66r - F.Fr.15014, f°11r-13v - F.Fr.15016, f°283r-286r - F.Fr.20036, p.12-16 - F.Fr.25570, p.19-22 - F.Fr.25570, p.175-178 - Nouv.Acq.Fr. 4773, f° 6r-7v - Arsenal, 3359, p.107-110 - BHVP, MS 663, f° 76r-79v - Institut, 647, f°109r-110v - Mazarine, 3971, p.38-44 - Bordeaux, BM, 700, f° 7v-10r -Grenoble, BM, 587, f° 42v-43v - Lyon, BM, 750, f° 210r-211r - Lyon, BM, 751, f° 56v-57v - Lyon, BM, 754, f° 8-9