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Lettres patentes portant attribution des causes entre les sujets de la Calotte au Parlement de Paris

Lettres patentes portant attribution des causes
entre les sujets de la Calotte au Parlement de Paris
Nous, les États de la Calotte,
Assemblés en grand comité
Pour le bien et l’utilité
De toute gent porte-marotte,
À tous les calotins divers
Tant deçà que delà les mers,
Salut, plaisir et bonne chère,
Repos, argent et nulle affaire.
Aujourd’hui, de la part d’Aymon
Et Saint-Martin son compagnon,
Tous deux absents contre l’usage,
Un envoyé portant message
Nous ayant requis d’être ouï,
Est entré, puis a dit : Oui,
Messeigneurs, il n’est plus possible
À nos deux braves généraux
De soutenir les grands travaux
Attachés à l’emploi pénible
Par eux exercé dans l’État
Avec tant de gloire et d’éclat ;
La nation se multiplie,
Le sage au calotin s’allie,
D’où naissent souvent des mertifs [sic]
Comme mulets autant rétifs.
Le désordre de la finance,
La fureur et la pétulance
De deux partis audacieux
Qui voudraient s’arracher les yeux
Pour quelques disputes frivoles,
Vous dirai-je pour des paroles ?
Quel en fut le commencement ?
Le voici. Le pape Clément
Revenant de Sainte-Marine,
Découvrit son bas de l’échine
Et fit un très copieux cas
(Parole, Seigneur, ne pue pas).
Alors passait un fils d’Ignace,
Suivi d’un zélé pour la grâce.
Tous deux le trouvèrent fumant.
Quelle odeur ! cria le pédant.
C’est parfum, benjoin et civette,
C’est ambre, musc ; tout cassolette
N’exhale si suave odeur ;
Ô la délectable vapeur !
Approchez, sentez. L’autre arrive
Approche son nez assez près ;
Mais dans l’instant même il dérive
Criant : Maugrébien du punais
Qui trouve ceci délectable !
C’est du bren qui pue comme diable.
Tout beau, tout beau, restez-en là,
Lui dit l’enfant de Loyola ;
C’est l’ouvrage du Très Saint Père.
Sachez que son sacré derrière
Fait toujours infailliblement
Étrons sentant suavement,
Et vous devez le reconnaître
Tout purement et simplement,
Sinon vous… – cela ne peut être.
Il sent tout comme un autre cas.
– Ah, vous ne le voulez donc pas ?
Qu’on l’emprisonne, qu’on l’exile,
Cet homme hautain, fin odorat.
J’en appelle au futur concile.
Ainsi, Seigneurs, de votre état
Pour une très sotte querelle
Qui tous les jours se renouvelle
L’on bannit les jeux et les ris.
Pour quoi vous êtes tous requis
Afin que bientôt se termine
Cette dispute calotine,
Et qu’on soulage en leurs travaux
Nos deux illustres généraux.
De donner le soin des affaires
Et des causes particulières
À des calotins de renom
Disant tantôt oui, tantôt non,
Comme le requiert l’occurrence,
Réservant la surintendance
De l’état du Seigneur Aymon
Et saint-Martin, son compagnon.
Sur ce vu, le réquisitoire
De l’envoyé du Général,
Et bien réfléchi sur l’histoire
De la cause et source du mal
Qui tant aigrit le Loyoliste
Contre l’entêté Queneliste,
Lequel pour se donner la paix
Jure qu’il ne dira jamais
Que le sacré cas du Saint-Père
N’exhale pas mauvaise odeur.
Pour mettre fin à cette affaire
Qui n’eût tant causé de malheur
Si dès la première origine
Devant une cour calotine
L’on eût apporté ce débat,
Nommons pour juge en notre État
Toute la gent parlementaire
Qui siège au Palais, à Paris,
Vu son adresse singulière
À bien ménager les esprits.
Ordonnons qu’en même séance,
Selon le cas et l’exigence,
Pour l’un et pour l’autre parti
L’on donne arrêt contradictoire
Sur l’ambigu réquisitoire
De notre procureur Fleury
Ou Gilbert, notre favori,
Le grand fauteur de La Vallière.
Voulons, afin de satisfaire
Et contenter nos grands prélats
Soi complaignant des attentats
Que la Cour aurait osé faire,
Par elle soit pareillement
Fustigé bien et proprement
Un certain prélat, leur confrère,
Et d’autres pour s’être avisés
De les appeler culs fessés.
Mais pour maintenir la balance
Et qu’ils ne puissent trop crier,
Voulons qu’on brûle la défense
Du fanatisme du Poirier.
Si mandons dans tout notre empire
À tout sujet aimant à rire,
De porter audit Parlement
Soit par appel ou autrement,
Toute plainte, requête ou cause,
Sur grande et sur petite chose
Émue entre particuliers.
Déclarons à nos calottiers
Qu’aux généraux l’État réserve
Et spécialement leur conserve
Le pouvoir de révision
De Veniat, de cassation
Qui fait le plus beau du domaine
De l’autorité souveraine.
Donnons à notre amé Portail
De nos ordres tout l’attirail,
Initions à nos mystères
Jeunes et vieux parlementaires,
Hors Pucelle, ce gros Testard
Qui nous manquerait tôt ou tard.

 

Numéro
$4276





Références

F.Fr.12654, p.175-80 - F.Fr.9353, f°183r-185v - F.Fr.15015, f°21r-25r - F.Fr.20036, p.303-09 - F.Fr.25570, p.745-51 - Nouv.Acq.Fr. 2485, f°64r-65v - Lille BM, MS 64, p.387-96