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Fragment d’un brevet d’exclusion du Régiment pour M. l’abbé Pucelle

Fragment d’un brevet d’exclusion du Régiment
pour M. l’abbé Pucelle
                                            Vitrix causa diis placuit, sed victa caloni
De par le dieu de la marotte,
Nous, ses fidèles substituts
Dans les États de la Calotte,
Voulant, par de nouveaux statuts,
De notre légion sacrée
Interdire l’entrée
À toutes sortes de vertus.
Tous points déduits et débattus,
Nous excluons l’abbé Pucelle
Qui dedans son cœur les recèle.
……………………………………..
Trop bien savons que par ses dits,
Tantôt modestes, tantôt hardis,
Il enfonce jusque dans l’âme
Tous les traits du feu qui l’enflamme,
Qu’il y porte une illusion
Contre qui tout doit être en garde.
C’est aussi lui seul que regarde
Notre brevet d’exclusion.
Nous voulons lui fermer le passage
Aux biens et faveurs qu’en partage
Nous versons à profusion.
Et tel est le désavantage
D’être par nous ainsi conduit
Qu’il se verra du moins réduit
Au malheur d’être toujours sage.
Gens qui font un pareil usage
De leurs vertus, de leurs talents
Sont pour nous espions turbulents.
Aussi, sans tarder davantage,
Mettons à prix ses cheveux blancs,
Lors même que, dans son caprice
Le public toujours véhément,
Ainsi qu’un flambeau de justice,
Veut les placer au firmament,
Comme on fit, je ne sais comment,
Aux beaux cheveux de Bérénice.
Il peut bien s’assurer du moins
Que nous n’emploierons pas nos soins
A les orner de nos sonnettes,
De nos rats, de nos girouettes.
Les réservons pour nos prélats
Dont les puissances satisfaites
N’en font plus autrement de cas.
Du reste ce maître robin,
Plus entêté qu’un vieux robin [sic],
Quoique respecté dans Versailles
Pour la beauté de son caquet,
Et tout aussi vif au parquet
Que Catinat à la maisaille [?]
Fût-il digne du siècle d’or,
Il peut, s’il veut, de ses mains pures
Orner, mais non pas des guipures
Qui viennent de notre trésor.
Qu’il prenne la main de justice,
La balance et l’épée encore,
Vrais attributs de son office.
Thémis qu’il reçut dans son sein,
Un jour de trouble et de tocsin,
Lui doit du moins ce sacrifice
Que, sur les fleurs de lys assis,
Dans ses rapports toujours précis,
Sa candeur soit à toute épreuve
Et qu’en lui l’équité, sa sœur,
De l’orphelin et de la veuve
En fasse un hardi défenseur,
Que pour tous deux il entre en lice,
Mais qu’il laisse en paix
………………………………….
Cependant cet abbé Pucelle
Dont le feu sans cesse étincelle
Et qui veut toujours s’exhaler,
Vient de trouver à qui parler.
Enfin la faction romaine
A pris le ton de souveraine.
…………………………………….
Les noirs enfants de Loyola
Dont le zèle est pis que la rage
Viennent d’obtenir…. Halte-là,
Et n’en disons pas davantage.

 

Numéro
$4252


Année
1732




Références

F.Fr.12785, f°205r - Glaneur historique, 2 juin 1732