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Très humbles remontrances de l’avocat général de la Calotte à Momus

Très humbles remontrances de l’Avocat Général de la Calotte
à Momus
Le vingt juillet, en Conseil de Régence,
S’est présenté devant le tribunal
Du Dieu Momus l’Avocat Général,
Et sur les chefs suivant à fait instance.
Messieurs, dit-il, notre but principal,
C’est d’illustrer le Royaume de France
Par nos hauts faits, nos gestes et nos dits,
Non de ces faits, de ces dits, de ces gestes
Pareils à ceux qui dans les temps jadis
Par le bon sens ne furent contredits.
De tout cela nous méprisons les restes
Dans ces Français, stoïques furieux,
Que probité rend toujours bilieux,
Qui de leur temps vont toujours se complaindre.
Mais si Dieu plaît, nous les verrons s’éteindre,
Ces gens sans fraude et d’un esprit uni,
En toute chose aussi droits comme un i.
Dieu protecteur de la Dive Calotte,
Plaise surtout à Votre Majesté
De tout honneur exclure, et dignité
Tel dont vertu fait dire qu’il radote.
Ces gens ne sont dignes de la marotte.
Qu’ainsi chez nous ne soient admis
Que gens de raison ennemis,
Dont les écarts et les folles saillies,
En eux se trouvent réunis
Aux avertins, caprices, fantaisies,
Au jugement livrent rudes assauts.
Nous admirons d’iceux les vertiges,
Et vous prions avec révérence,
Que leur veuillez accorder bienveillance,
Sauvegarde, protection.
En tout État, province, région,
En Allemagne, Italie, Angleterre,
Et leurs confins, bref par toute la terre.
Nous connaissons personnages divins,
D’esprit, d’humeur excellents calotins.
Pour leur donner privilège et franchise,
Et les honneurs qu’exigent leurs talents,
Il faudra qu’on les naturalise.
Plaise, Seigneur, les traiter comme enfants
Nés et nourris en terre calotine,
Et qu’au surplus des fonds on leur destine,
Pour harceler sans cesse le bon sens.
Et comme on sait que la prudence,
La valeur et l’expérience
Des grands homes et des héros
Doit à jamais perpétuer leur los,
Qu’en chaque jour leur divine puissance,
Après leur mort dans Rome, et dans Paris,
Vienne, Madrid et maints autres pays,
Par des prodiges inouïs
Se manifeste aux sublimes esprits,
Qui, sous le nom de Nation dévote,
Sont cantonnés avecque la Calotte,
Peuple connu d’amis et d’ennemis,
Peuple partout envoyant la milice,
Servant les grands comme la gent suisse.
A cet effet, vous requerrons, Seigneur,
Et supplions avec zèle et ferveur,
Qu’entre défunts Calotins on élise
Ceux dont les écarts merveilleux
Ont mérité notre encens et nos vœux.
Vous proposons qu’iceux on canonise,
Afin qu’on puisse, étant reconnus saints,
Les imiter en tous leurs avertins.
De tout héros, soit en vers, soit en prose,
Le droit divin, qu’on nomme apothéose,
Peut effacer jusqu’aux moindres défauts,
D’un beau vernis colorer leurs travaux.
Dont appelons au céleste Mécène
Des Allemands, Saint Jean Népomucène,
Mieux célébré dans ce dévot pays
Que dans Paris n’est sainte Geneviève,
Luther à Dresde et Calvin à Genève.
Sur ce, donnons très humblement avis
Du beau talent, génie et suffisance
Que chacun sait être en Son Éminence1
Pour l’examen du céleste pouvoir.
Car ce prélat, pilier des catholiques,
Connaît des saints les forces héroïques,
Et vers la foi peut le zèle mouvoir.
Or donc, Seigneur, vous plaira le pourvoir
Du titre d’Archilégendaire,
Avec puissance nécessaire
Et les gages et le salaire
Annexés au droit glorieux
D’élever au rang des Dieux
Ces vrais héros, qui jusqu’au dernier âge,
De la Calotte exigeront l’hommage.

 

  • 1Le C*** A. de P***. (M.).

Numéro
$4061


Année
1725 juillet




Références

1725, II,109-12 - 1726, 250-53 - 1732/1735, II,103-08 - 1752, II,103-07 - F.Fr.9353, f°186r-187v - F.Fr.15015, f 25v-28r - F.Fr.20036, p.250-54 - F.Fr.25570, p.713-16 - F.Fr.25570, p.836-38 - Nouv.Acq.Fr. 4773, f°54v (quatre premiers vers) - BHVP, MS 664, f°137r-140r - Bordeaux BM, MS 700, f°408r-410v - Grenoble BM, MS 587, f°96r-97v - Lille BM, MS 65, p.419-25