Aller au contenu principal

Brevet de la Calotte qui institue le Sr Mosnier confiseur du Régiment.

Brevet de confesseur du Régiment accordé au Sieur Mosnier

De par le dieu porte-marotte,

À tous nos gens de la Calotte,

Nous, lieutenant, savoir faisons

Que voulant par bonnes raisons

Ne pas laisser sans récompense,

Même au risque de notre manse,

Le mérite où nous le trouvons,

Nous plaît, voulons et approuvons,

Pour diriger la gent falote,

Fille, femme et toute bigote

Les Sieurs Mousnier, Hourdet, Briet.

Bien entendu que de Languet,

Ou de La Croix, son grand vicaire,

Ils auront pouvoir nécessaire.

Tel est leur droit, nous le savons.

De le nier dessein n’avons.

Dignes de notre bienveillance,

Voulons que, sur notre ordonnance,

Ils soient par le prélat admis

Sans être à l’examen soumis.

De leur capacité connue

Et de plus d’un fait soutenue,

Nous sommes instruits pleinement.

C’est assez pour le jugement.

N’exigeons point tant de science,

De discrétion, de prudence ;

De tels gens le nombre est petit.

Le respect pour l’Unigenit

Doit tenir lieu de tout mérite.

Mais leur mandons d’aller moins vite

En certains cas où il appert

Qu’ils peuvent être pris sans vert.

Un exemple va faire entendre

Ce qu’on ne voudrait pas comprendre.

Rien n'est plus beau que le dessein

Qu’avait Mosnier sur la Tassin.

Des siens il devenait l’oracle.

S’il eût fait crier au miracle,

Pâris perdait tout son crédit,

L’appelant crevait de dépit,

L’acceptant triomphait de gloire,

La Bulle obtenait la victoire,

Et Tassin conduite au tombeau

Valait La Coque en son plus beau.

L’actrice était fort bien choisie,

Femme à vapeurs, à frénésie,

Simple, prête à tout recevoir,

À tout présumer, à tout voir.

A ce point par degrés conduite

Mosnier l’avait si bien séduite

Qu’elle prenait certains récits

Qui chez lui se faisaient les nuits

Des songes plaisants, agréables,

Pour des vérités respectables.

Jusque là tout allait son train :

Restait le dernier coup de main :

Lui prêter une léthargie,

Sans lui faire quitter la vie,

Était le parti plus discret.

Alors on pouvait en secret

Se faire bénir par la sainte,

Et lui donner preuve non feinte

D’amour ou de respect profond.

Puis venant au gouffre sans fond,

À l’instant pour le purgatoire

Monter au séjour de la gloire.

Elle eût en ce moment tout vu

Ce que Mosnier aurait voulu,

Puis des visions bien décrites

Et de La Croix dûment souscrites,

Sans pourtant trop les divulguer,

Pouvaient chez les Grecs reléguer

Celui d’entre les jansénistes

Qu’on croit des meilleurs figuristes

C’était trop que les sacrements…

Sans beaucoup de raisonnements,

Mosnier pouvait fort bien comprendre

Qu’à tous il allait faire entendre

Qu’en ignorant il se trompait

Ou bien que l’Église il jouait ;

On peut lui passer l’agonie,

C’était une cérémonie

Qu’il pouvait encore hasarder,

Mais il fallait bien se garder

De donner si tôt en spectacle

La Tassin, ce nouvel oracle.

Plus d’une fois l’obscurité

Fit croire le faux vérité.

Mosnier aurait pu lui permettre

D’aller chez Hourdet se remettre,

D’y bien souper, d’y prendre un lit,

Pourvu que tout s’y fît sans bruit.

Attendu pourtant ses services

Lui continuons ses offices ;

Voulons qu’il soit, et ses consorts,

Partout absous de tous leurs torts.

De plus, lui permettons de prendre,

Et sans qu’aucun puisse y prétendre,

Le titre de grand directeur

De la Calotte et gens sans cœur.

Numéro
$4345


Année
1732




Références

1754, V,137-40 - F.Fr.10476, f°336 - F.Fr.12655, p.215-18 -F.Fr.15146, p.314-21 - F.Fr.25570, p.641-44


Notes

Un certain Mosnier aurait opposé au jansénisme une sainte dame Tassin, comme Languet de Gergy l'avait fait avec Marguerie Alacoque. Voir le récit de l'épisode en $4346.