Brevet de calotin pour M. l'archevêque d'Arles sur son mandement
De par le dieu porte-marotte,
Nous, général de la Calotte,
À chacun sans distinction
Salut, joie et dilection.
Ayant appris que l'archevêque d'Arles,
Qui veut que de lui chacun parle,
A mis au jour un mandement
Plein d'esprit et de jugement
Où de la Bulle épousant la querelle
Pour plaire à la docte séquelle
Des disciples de Loyola,
Malgré tout ce qu'on en dira,
Il s'est imaginé sans répugnance aucune
Qu'il augmenterait sa fortune,
Et que ce bel écrit dont il fait grand état
Le ferait parvenir jusqu'au cardinalat.
À ces causes, ayant entière connaissance
De son esprit sublime et de sa haute science,
Et ce par des avis certains
De nos frères les calotins,
On a jugé qu'il était nécessaire
De faire sur cette matière
Assembler notre grand Conseil
Pour décider en cas pareil,
Où, la chose étant proposée
Et chacun se trouvant conforme à ma pensée,
On a conclu qu'on ne pouvait enfin
Lui refuser un bonnet calotin,
Avec privilège authentique
De se moquer de sa critique,
De faire valoir ses talents
Par ses écrits impertinents,
Les faire imprimer, les produire
Et fournir matière de rire
Par la plus fade prose et les plus mauvais vers
Que l'on ait vus dans l'univers ;
Que contre les paniers sans cesse il se récrie,
Que d'un zèle indiscret il se mette en furie,
Et que sans épargner le plus illustre sang,
Il mette tout au même rang.
Comme des calotins le prélat est l'élite
Et voulant faire droit à son rare mérite,
Nous l'avons d'un commun et plein consentement
Fait l'orateur de tout le Régiment,
Et pour mieux honorer cette place importante,
Lui avons accordé vingt mille écus de rente,
Lesquels dits vingt mille écus
Lui seront payés et perçus
Sur toutes les belles risées,
Les extravagantes pensées,
Gestes, discours et entretiens
Des habitants des Petites-Maisons.
Enjoignons à nos commissaires,
Soit trésoriers, soit gens d'affaires,
De mettre le brevet en exécution
Sans aucune discussion.
Fait en l'an où les molinistes
En guerre avec les jansénistes
Troublent la religion
Par une folle opinion.