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Arrêt pour recevoir les beaux esprits hollandais dans les troupes de la Calotte, en qualité d’auxiliaires

Arrêt pour recevoir les beaux esprits Hollandais
dans les troupes de la Calotte, en qualité d’auxiliaires1
De par le dieu porte-marotte,
Nous, Général de la Calotte,
Ayant appris que les États,
Vulgo les États de Hollande,
Peuvent fournir plus de soldats
Qu’il n’est de saints dans la légende,
Qu’en urgente nécessité
Leurs milices auxiliaires
Avec courage ont résisté
Aux subtilités étrangères ;
Que même, depuis nombre d’ans,
On y fabrique faux brillants,
Oripeaux, clinquant à la mode,
Et que sans secours, ni méthode,
Sans aller recourir ailleurs,
Ils ont leurs propres barbouilleurs,
Plats, bouffons, grossiers rimailleurs,
Faiseurs de livres par douzaines,
Et de brochures par centaines.
En quoi nous admirons leur art,
Vu la vapeur et le brouillard,
Et les exhalaisons bourbeuses
De ces terres marécageuses,
Lesquelles offusquent souvent
Et l’esprit et le jugement.
Or donc, dans notre assemblée,
L’habileté considérée
De ces adroits républicains,
Ne voulons que, comme forains,
On les prive des avantages
Qu’en nos villes et nos villages
Doit avoir comme un juste bien
Quiconque est notre citoyen.
De notre suprême puissance
Voulons qu’en toute diligence
En nos cours et présidiaux,
On leur donne lettres royaux
Pour reconnaître en notre empire
Leurs rats, vertigos et délire.
À vous, officiers, enjoignons
De recruter nos bataillons
Des milices de ces cantons,
Autrement dit pays Belgique.
Et nous plaît par cette rubrique,
Qu’aux enrôlements soient nommés
Les suivants-là très renommés :
Le faux-saunier du sel attique,
V… f ; poète, traducteur,
Philosophe, dissertateur,
Le tout à dix florins la feuille,
Philip2 , auteur d’un portefeuille,
Contenant mots et dits joyeux
Des beaux esprits marécageux,
Sentences, expressions tendres,
Où brille même l’homme aux cendres.
Le lexicographe Br…,
Des compilateurs le doyen,
Les très révérants anonymes,
Compilateurs illustrissimes
Du journal par lequel Wetstein
Vante à l’Europe son fretin.
Leur adjoignons en ces offices
De recruteurs de nos milices,
Tels qu’ils jugeront à propos,
Fussent-ils natifs wisigoths.
De notre grâce spéciale,
Leur permettons des prédicants,
Diacres anciens et proposants.
Mais ne voulons qu’il se cabale
Entre eux pour la foi de Calvin
Contre le pontife romain.
Leur défendons la controverse.
Souffrons que leur zèle s’exerce,
(Mais avec modération)
Sur la froissure de Sion.
Leur laissons certaines marottes
Pour leurs dévots et leurs dévotes,
Comme de leur parler souvent
Par types ou mystiquement
Et d’obscurités consolantes
Nourrir les âmes protestantes,
Plus en langage de Marot,
Pour l’amour de la gent Wallonne,
Peuple saintement idiot,
Voulons que le psaume s’entonne.
Et comme il n’est plus de Saurin,
Qu’un beau cliquant nous recommande,
Nous accordons à leur demande
La Cha… pour Chapelain.
Lui commettons la discipline
Et l’ordre de nos bataillons.
Si n’entendons qu’aucun décline
Ses arrêts ou décisions.
Par lui, notre vouloir s’explique,
Et ne voulons qu’on le critique,
Ou fronde par objections ;
Parce qu’étant né pour la chaire,
Il reçoit emploi militaire.
Son zèle étant zèle guerrier,
Il fera le double métier.
Fait en l’an que de la doctrine,
Notre prudence calotine,
Trancha le nœud, décida net,
Chacun opinant du bonnet.

  • 1Cette pièce a paru en partie en 1726. On la redonne ici plus ample (M.).
  • 2Saint-Philip. auteur du Je ne sais quoi (M.).

Numéro
$4138





Références

1732/1735, III,148-152 - 1752, III,147-151 - F.Fr.9353, f°285r-287v - F.Fr.15014, f°61r-64v - F.Fr.20036, p.289-294 - F.Fr.25570, p.867-870 - Nouv.Acq.Fr. 2485, f°144r-146v - BHVP, MS 664, f°140v-144v - Bordeaux BM, MS 700, f°411r-414r - Grenoble BM, MS 587, f°99r-100v


Notes

autre version du N°516